Droit de l’espace : évolution, révolution ou déliquescence annoncée?
Droit de l’espace : évolution, révolution ou déliquescence annoncée?
© Affiche de la Nasa

publié le 21 mars 2023 à 03:57

1838 mots

Droit de l’espace : évolution, révolution ou déliquescence annoncée?


La privatisation, l’exploitation commerciale et la colonisation de l'espace sont devenues juridiquement légales pour la puissance spatiale américaine. Cet état de fait a été décidé, imposé au monde entier sans consultation préalable, de façon unilatérale et en violation des principes fondamentaux de base du droit international de l’espace. Le Space Act américain et la violation du droit spatial international Après maintes sollicitations du gouvernement américain par les entreprises privées désireuses de voir notre Espace privatisé et de se voir garantir des droits, notamment de propriété, une loi nationale, le « Space Act », a été approuvée fin 2015 par le Sénat américain et ratifiée par le Président Barak Obama. les Etats Unis ont clairement affiché la volonté de s’accaparer les matières premières de l'Espace , grâce à cette législation historique, autorisant les entreprises privées à forer les corps célestes pour en extraire les matières premières et les commercialiser. C’est une réelle révolution juridique et la naissance d’une nouvelle industrie. Nous ne savons pas encore, en particulier en tant que citoyens de pays en développement, pays non encore dotés de la technologie spatiale, si nous devons nous en réjouir ou fortement nous en inquiéter. Bénéficiaires de licences d’exploitation des minerais, des matières premières extraites des corps célestes, des astéroïdes et de la Lune, les entreprises privées américaines pourront désormais extraire des métaux rares, de l’eau, du gaz, de l’hélium et du partinium (voir mes articles précédents sur le réseau linkedin). Jusqu’alors domaine réservé des Etats, l’espace est de plus en plus investi par le secteur privé. C’est le cas des sociétés comme Blue Origin, Space X présidée par le milliardaire Elon Musk qui fait parler d’elle en matière de lancement de fusées récupérables, de lancements de petits satellites peu coûteux et de projet de colonisation future de la planète Mars, ou bien encore Blue Origin dirigée par Jeff Bezos , Virgin Galactic dirigée par le britannique Richard Branson, Skybox Imaging, Sierra Nevada Corporation, Planetary Resources, Google, etc… Ces acteurs sont les plus emblématiques de ce que l’on nomme le « New Space » et plus de 1000 entreprises de taille plus ou moins importante, principalement implantées aux Etats-Unis, se tiennent déjà prêtes pour l’aventure. Dès lors, à qui appartient l’espace ? Nous pensions pourtant, scientifiques, observateurs et juristes internationaux, que cette question avait été réglée par le traité de base en droit international spatial ou traité de l’espace de 1967, ratifié par les Etats Unis et l’ex URSS, et par celui de 1979 ou Traité sur la Lune et les autres corps célestes cependant prudemment non signé par les premiers. Adopté lors de la guerre froide, le traité de l'espace de 1967 énonce plusieurs principes relatifs à notre Espace, dont celui du respect de l’intérêt de l’humanité toute entière, de l’utilisation à des fins pacifiques et principalement celui de non appropriation. Si l’Espace peut être exploré et exploité librement, aucune nation ne peut y réclamer de propriété. Par ailleurs, l’orbite géostationnaire constitue en même temps une ressource naturelle limitée et de plus en plus encombrée. L’Espace ne doit devenir ni un espace colonisé, ni déjà encombré, une poubelle planétaire. Or, avec le Space Act, nous assistons de façon passive à une mise en place latente de cette violation unilatérale du principe de non appropriation et du droit international. Les arguments mis en avant Il est une réalité mise en exergue par les puissance spatiales qui est l’inadéquation entre le droit élaboré il y a un demi siècle et l’essor fulgurant des technologies spatiales. En 1967, personne n’avait envisagé qu'un jour des sociétés privées pourraient se lancer dans l’exploration spatiale et encore moins dans la commercialisation de ces activités. Au départ de la conquête de l’Espace, les deux seuls Etats disposant d’une technologie en la matière, les Etats Unis et l’ex URSS avaient élaboré les dispositions du traité de l’espace. Puis, ils ont assisté à l’élargissement du club des puissances spatiales, d’abord avec l’Europe, puis aujourd’hui avec les pays émergents dont principalement la Chine, suivis de l’Inde et plus récemment des Emirats Arabes Unis. Sous la présidence Bush, les Etats Unis vont tenter à maintes reprises d’écorcher le traité de 1967. C’est semble t-il face à l’essor des technologies spatiales et à l’ascension formidable de la Chine et d’une concurrence certaine et fulgurante, que les Etats unis ont réagi en adoptant le Space Act ; la présidence Obama encourageant fortement les entreprises privées américaines à prendre le relais dans la conquête spatiale. Ainsi, profitant du flou à leur sens et de l’ancienneté des traités internationaux, ils argumenteront principalement que ces traités n'évoquent que la propriété du sol. Ils confèrent leur propre interprétation du traité de l’espace et considèrent qu’il ne se réfère qu’aux problèmes de territoires. Ainsi, la non-appropriation de l’espace ne concernerait que les lieux et non pas les ressources qui s'y trouvent, à l’instar de ce qui se passe en haute mer. Qu’il s’agisse des astéroïdes ou des ressources lunaires. Autre argument : Si le traité de l’espace précise qu'aucune nation ne peut proclamer de souveraineté en dehors de notre planète, il ne prévoit pas directement l'appropriation éventuelle de ressources, notamment minières, par les ressortissants desdites nations. Le principe de non appropriation ne concernerait que les Etats et non pas les entreprises privées. Ces tours de passe-passe ne convainquent toujours pas la communauté juridique internationale. Quant à l’accord de 1979 ou Accord régissant les activités des États sur la Lune et les autres corps célestes en vertu duquel on ne peut pas se déclarer propriétaire d'un corps céleste, les Etats Unis ne s’estiment pas liés par ses dispositions, car ils ne l’ont pas signé. Les autres pays industrialisés confortés par les immenses possibilités qui s’ouvriront à eux bientôt, les pays émergents dans l’expectative également d’entamer dans un futur moins proche des forages dans l’espace et les pays en développement impuissants, assistent désormais aux débuts de la colonisation de l'Espace. Quant au concept de Patrimoine commun de l’Humanité, remis en cause plusieurs fois au niveau du droit international général, il est à nouveau foulé au pied des ambitions mercantiles avouées ou rampantes. Au début, la suprématie des Etats se faisait par celle des mers, aujourd’hui c’est sur l’Espace extra atmosphérique que la domination se perpétue. Space Act et New Space marqueront sans aucun doute l’avenir du droit de l’espace et mettront à la trappe les principes le régissant jusqu’ici, et alors qu’en même temps nous n’en sommes en ce début de 21ème siècle, qu’aux balbutiements de la conquête spatiale. Les inquiétudes liées à l’accès aux données satellitaires Assisterons nous également à un bouleversement du régime juridique découlant des « Principes relatifs à l’observation depuis l’espace par télédétection spatiale » adoptés par résolution de l’assemblée générale de l’ONU en 1986. Ces principes énoncent la liberté d’observation, d’exploitation et de diffusion des données. Depuis longtemps, la question de la facilitation à l’accès aux données satellitaires a toujours interpellé les pays qui ne disposaient pas de satellites. C’est au sein du sous-comité juridique de l’espace de l’ONU qu’ils en débattent notamment, annuellement. Mais qu’adviendra t-il avec la constellation de satellites plus perfectionnés prêts à être lancés pour photographier en haute résolution toute la planète. Certes, cela permettra de mieux étudier les phénomènes climatiques et de rendre maints services à l’humanité, mais cela soulève de nombreuses inquiétudes en particulier sur le plan sécuritaire. Là encore, face aux progrès technologiques retentissants, le devenir du régime juridique élaboré dans les années 80 régissant les données d’observation de la Terre par satellite est devenu incertain. Les seuls obstacles actuels sont simplement d’ordre financier et technologique. Les entreprises auront-elles les moyens de financer des projets aux sommes exorbitantes ? Pour l’heure, des années de préparation sont encore nécessaires et le partenariat public-privé, comme la coopération spatiale internationale sont en bonne voie. Un revers de la médaille positif ? Il reste à espérer que les ambitions commerciales des investisseurs privés dans ce nouvel eldorado et la volonté d’asseoir une suprématie politique renforcée tant par les russes que par les américains, seront associées à une réelle démocratisation de l’accès à l’Espace. Compte tenu de la baisse des coûts du spatial du fait de la concurrence privée et de celle des pays émergents, les pays en développement pourraient mener à bien les programmes de leurs agences spatiales. Gageons que la vulgarisation et la démocratisation de l’accès aux techniques spatiales constituent les pans positifs du bouleversement à venir et que l’essor d’une coopération internationale en la matière puisse favoriser les applications des techniques spatiales à retombées utiles, en particulier pour le développement durable et la lutte contre les changements climatiques. Ces enjeux seront débattus lors de la prochaine Conférence des Nations Unies sur l’exploration et les utilisations pacifiques de l’Espace extra-atmosphérique qui se tiendra à Dubaï en 2017, ainsi que lors du 50èmeanniversaire d’UNISPACE, UNISPACE’50 prévu également à Dubaï en 2018. Quelques inquiétudes avec la nouvelle présidence américaine Si l’actuel Président comme les précédents depuis Kennedy et l’époque de la guerre froide, n’a jamais démontré un intérêt crucial pour l’enjeu spatial, la récente volonté de leadership et de suprématie retrouvée affichée laissent perplexes. Relèvera t-il le budget fédéral dédié à la conquête spatiale en baisse ? Il semble que l’enjeu de la privatisation et de la commercialisation décomplexée de l’Espace suscitera un intérêt croissant, au détriment de l'étude de notre planète et du réchauffement climatique. "Nous devons reprendre en main le destin de notre pays, avoir de grands rêves, viser les étoiles", affirmait le Président Donald Trump lors d’ un récent discours. La prise de décision unilatérale et égoïste ne fera qu’intensifier la pollution de l’Espace déjà fortement encombré par des débris spatiaux. De la même façon, en matière de ressources terrestres, le risque est grand de voir les Etats Unis se désolidariser des autres nations pour lutter contre le réchauffement climatique. Car peut être, les Etats Unis ne peuvent ils pas dénoncer juridiquement l’Accord sur le climat, Accord de Paris historique pour une justice climatique ratifié le 4 novembre 2016, mais rien ne les empêche juridiquement à ne pas l’appliquer. Cet accord aussi porteur soit-il, n’est pas juridiquement contraignant, il n’impose ni mécanisme de coercition, ni de sanction, mais repose sur la bonne volonté des Etats. Ce qui d’ailleurs en a fait le succès. Compte tenu des propos du nouveau Président américain pour qui la question de la protection climatique et des changements climatiques relève d’un « canular », et compte tenu de se projets en matière industrielle, de coopération, de repli sur soi suivant une approche profondément nationaliste et populiste, il paraît aléatoire que ce pays pollueur en puissance respecte les engagements pris sous la présidence Obama. Seule une publicité néfaste pour les pays pollueurs irrespectueux de leurs engagements sera diffusée. Et dans ce cas, on peut douter du rôle des « satellites policiers » (voir mes articles sur Linkedin). Ce qui fait craindre également l’effet boule de neige sur les pays premiers émetteurs de gaz à effet de serre comme la Chine ou l’Inde qui jusque là ont démontré leur volonté de lutter pleinement contre le crime climatique.
21/03/2023 03:09
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Droit de l’espace : évolution, révolution ou déliquescence annoncée?

Droit de l’espace : évolution, révolution ou déliquescence annoncée?

Droit de l’espace : évolution, révolution ou déliquescence annoncée?
Droit de l’espace : évolution, révolution ou déliquescence annoncée?

La privatisation, l’exploitation commerciale et la colonisation de l'espace sont devenues juridiquement légales pour la puissance spatiale américaine. Cet état de fait a été décidé, imposé au monde entier sans consultation préalable, de façon unilatérale et en violation des principes fondamentaux de base du droit international de l’espace. Le Space Act américain et la violation du droit spatial international Après maintes sollicitations du gouvernement américain par les entreprises privées désireuses de voir notre Espace privatisé et de se voir garantir des droits, notamment de propriété, une loi nationale, le « Space Act », a été approuvée fin 2015 par le Sénat américain et ratifiée par le Président Barak Obama. les Etats Unis ont clairement affiché la volonté de s’accaparer les matières premières de l'Espace , grâce à cette législation historique, autorisant les entreprises privées à forer les corps célestes pour en extraire les matières premières et les commercialiser. C’est une réelle révolution juridique et la naissance d’une nouvelle industrie. Nous ne savons pas encore, en particulier en tant que citoyens de pays en développement, pays non encore dotés de la technologie spatiale, si nous devons nous en réjouir ou fortement nous en inquiéter. Bénéficiaires de licences d’exploitation des minerais, des matières premières extraites des corps célestes, des astéroïdes et de la Lune, les entreprises privées américaines pourront désormais extraire des métaux rares, de l’eau, du gaz, de l’hélium et du partinium (voir mes articles précédents sur le réseau linkedin). Jusqu’alors domaine réservé des Etats, l’espace est de plus en plus investi par le secteur privé. C’est le cas des sociétés comme Blue Origin, Space X présidée par le milliardaire Elon Musk qui fait parler d’elle en matière de lancement de fusées récupérables, de lancements de petits satellites peu coûteux et de projet de colonisation future de la planète Mars, ou bien encore Blue Origin dirigée par Jeff Bezos , Virgin Galactic dirigée par le britannique Richard Branson, Skybox Imaging, Sierra Nevada Corporation, Planetary Resources, Google, etc… Ces acteurs sont les plus emblématiques de ce que l’on nomme le « New Space » et plus de 1000 entreprises de taille plus ou moins importante, principalement implantées aux Etats-Unis, se tiennent déjà prêtes pour l’aventure. Dès lors, à qui appartient l’espace ? Nous pensions pourtant, scientifiques, observateurs et juristes internationaux, que cette question avait été réglée par le traité de base en droit international spatial ou traité de l’espace de 1967, ratifié par les Etats Unis et l’ex URSS, et par celui de 1979 ou Traité sur la Lune et les autres corps célestes cependant prudemment non signé par les premiers. Adopté lors de la guerre froide, le traité de l'espace de 1967 énonce plusieurs principes relatifs à notre Espace, dont celui du respect de l’intérêt de l’humanité toute entière, de l’utilisation à des fins pacifiques et principalement celui de non appropriation. Si l’Espace peut être exploré et exploité librement, aucune nation ne peut y réclamer de propriété. Par ailleurs, l’orbite géostationnaire constitue en même temps une ressource naturelle limitée et de plus en plus encombrée. L’Espace ne doit devenir ni un espace colonisé, ni déjà encombré, une poubelle planétaire. Or, avec le Space Act, nous assistons de façon passive à une mise en place latente de cette violation unilatérale du principe de non appropriation et du droit international. Les arguments mis en avant Il est une réalité mise en exergue par les puissance spatiales qui est l’inadéquation entre le droit élaboré il y a un demi siècle et l’essor fulgurant des technologies spatiales. En 1967, personne n’avait envisagé qu'un jour des sociétés privées pourraient se lancer dans l’exploration spatiale et encore moins dans la commercialisation de ces activités. Au départ de la conquête de l’Espace, les deux seuls Etats disposant d’une technologie en la matière, les Etats Unis et l’ex URSS avaient élaboré les dispositions du traité de l’espace. Puis, ils ont assisté à l’élargissement du club des puissances spatiales, d’abord avec l’Europe, puis aujourd’hui avec les pays émergents dont principalement la Chine, suivis de l’Inde et plus récemment des Emirats Arabes Unis. Sous la présidence Bush, les Etats Unis vont tenter à maintes reprises d’écorcher le traité de 1967. C’est semble t-il face à l’essor des technologies spatiales et à l’ascension formidable de la Chine et d’une concurrence certaine et fulgurante, que les Etats unis ont réagi en adoptant le Space Act ; la présidence Obama encourageant fortement les entreprises privées américaines à prendre le relais dans la conquête spatiale. Ainsi, profitant du flou à leur sens et de l’ancienneté des traités internationaux, ils argumenteront principalement que ces traités n'évoquent que la propriété du sol. Ils confèrent leur propre interprétation du traité de l’espace et considèrent qu’il ne se réfère qu’aux problèmes de territoires. Ainsi, la non-appropriation de l’espace ne concernerait que les lieux et non pas les ressources qui s'y trouvent, à l’instar de ce qui se passe en haute mer. Qu’il s’agisse des astéroïdes ou des ressources lunaires. Autre argument : Si le traité de l’espace précise qu'aucune nation ne peut proclamer de souveraineté en dehors de notre planète, il ne prévoit pas directement l'appropriation éventuelle de ressources, notamment minières, par les ressortissants desdites nations. Le principe de non appropriation ne concernerait que les Etats et non pas les entreprises privées. Ces tours de passe-passe ne convainquent toujours pas la communauté juridique internationale. Quant à l’accord de 1979 ou Accord régissant les activités des États sur la Lune et les autres corps célestes en vertu duquel on ne peut pas se déclarer propriétaire d'un corps céleste, les Etats Unis ne s’estiment pas liés par ses dispositions, car ils ne l’ont pas signé. Les autres pays industrialisés confortés par les immenses possibilités qui s’ouvriront à eux bientôt, les pays émergents dans l’expectative également d’entamer dans un futur moins proche des forages dans l’espace et les pays en développement impuissants, assistent désormais aux débuts de la colonisation de l'Espace. Quant au concept de Patrimoine commun de l’Humanité, remis en cause plusieurs fois au niveau du droit international général, il est à nouveau foulé au pied des ambitions mercantiles avouées ou rampantes. Au début, la suprématie des Etats se faisait par celle des mers, aujourd’hui c’est sur l’Espace extra atmosphérique que la domination se perpétue. Space Act et New Space marqueront sans aucun doute l’avenir du droit de l’espace et mettront à la trappe les principes le régissant jusqu’ici, et alors qu’en même temps nous n’en sommes en ce début de 21ème siècle, qu’aux balbutiements de la conquête spatiale. Les inquiétudes liées à l’accès aux données satellitaires Assisterons nous également à un bouleversement du régime juridique découlant des « Principes relatifs à l’observation depuis l’espace par télédétection spatiale » adoptés par résolution de l’assemblée générale de l’ONU en 1986. Ces principes énoncent la liberté d’observation, d’exploitation et de diffusion des données. Depuis longtemps, la question de la facilitation à l’accès aux données satellitaires a toujours interpellé les pays qui ne disposaient pas de satellites. C’est au sein du sous-comité juridique de l’espace de l’ONU qu’ils en débattent notamment, annuellement. Mais qu’adviendra t-il avec la constellation de satellites plus perfectionnés prêts à être lancés pour photographier en haute résolution toute la planète. Certes, cela permettra de mieux étudier les phénomènes climatiques et de rendre maints services à l’humanité, mais cela soulève de nombreuses inquiétudes en particulier sur le plan sécuritaire. Là encore, face aux progrès technologiques retentissants, le devenir du régime juridique élaboré dans les années 80 régissant les données d’observation de la Terre par satellite est devenu incertain. Les seuls obstacles actuels sont simplement d’ordre financier et technologique. Les entreprises auront-elles les moyens de financer des projets aux sommes exorbitantes ? Pour l’heure, des années de préparation sont encore nécessaires et le partenariat public-privé, comme la coopération spatiale internationale sont en bonne voie. Un revers de la médaille positif ? Il reste à espérer que les ambitions commerciales des investisseurs privés dans ce nouvel eldorado et la volonté d’asseoir une suprématie politique renforcée tant par les russes que par les américains, seront associées à une réelle démocratisation de l’accès à l’Espace. Compte tenu de la baisse des coûts du spatial du fait de la concurrence privée et de celle des pays émergents, les pays en développement pourraient mener à bien les programmes de leurs agences spatiales. Gageons que la vulgarisation et la démocratisation de l’accès aux techniques spatiales constituent les pans positifs du bouleversement à venir et que l’essor d’une coopération internationale en la matière puisse favoriser les applications des techniques spatiales à retombées utiles, en particulier pour le développement durable et la lutte contre les changements climatiques. Ces enjeux seront débattus lors de la prochaine Conférence des Nations Unies sur l’exploration et les utilisations pacifiques de l’Espace extra-atmosphérique qui se tiendra à Dubaï en 2017, ainsi que lors du 50èmeanniversaire d’UNISPACE, UNISPACE’50 prévu également à Dubaï en 2018. Quelques inquiétudes avec la nouvelle présidence américaine Si l’actuel Président comme les précédents depuis Kennedy et l’époque de la guerre froide, n’a jamais démontré un intérêt crucial pour l’enjeu spatial, la récente volonté de leadership et de suprématie retrouvée affichée laissent perplexes. Relèvera t-il le budget fédéral dédié à la conquête spatiale en baisse ? Il semble que l’enjeu de la privatisation et de la commercialisation décomplexée de l’Espace suscitera un intérêt croissant, au détriment de l'étude de notre planète et du réchauffement climatique. "Nous devons reprendre en main le destin de notre pays, avoir de grands rêves, viser les étoiles", affirmait le Président Donald Trump lors d’ un récent discours. La prise de décision unilatérale et égoïste ne fera qu’intensifier la pollution de l’Espace déjà fortement encombré par des débris spatiaux. De la même façon, en matière de ressources terrestres, le risque est grand de voir les Etats Unis se désolidariser des autres nations pour lutter contre le réchauffement climatique. Car peut être, les Etats Unis ne peuvent ils pas dénoncer juridiquement l’Accord sur le climat, Accord de Paris historique pour une justice climatique ratifié le 4 novembre 2016, mais rien ne les empêche juridiquement à ne pas l’appliquer. Cet accord aussi porteur soit-il, n’est pas juridiquement contraignant, il n’impose ni mécanisme de coercition, ni de sanction, mais repose sur la bonne volonté des Etats. Ce qui d’ailleurs en a fait le succès. Compte tenu des propos du nouveau Président américain pour qui la question de la protection climatique et des changements climatiques relève d’un « canular », et compte tenu de se projets en matière industrielle, de coopération, de repli sur soi suivant une approche profondément nationaliste et populiste, il paraît aléatoire que ce pays pollueur en puissance respecte les engagements pris sous la présidence Obama. Seule une publicité néfaste pour les pays pollueurs irrespectueux de leurs engagements sera diffusée. Et dans ce cas, on peut douter du rôle des « satellites policiers » (voir mes articles sur Linkedin). Ce qui fait craindre également l’effet boule de neige sur les pays premiers émetteurs de gaz à effet de serre comme la Chine ou l’Inde qui jusque là ont démontré leur volonté de lutter pleinement contre le crime climatique.


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