Le rêve d'un homme
A la fin des années 1930, Jack Northrop cherche à développer un nouveau type d'avion de combat pour ce qui deviendra l'actuelle Force aérienne américaine (USAF) : il veut un avion combinant une portance maximale et une faible trainée. C'est le début de l'aile volante aux États-Unis. En dehors de modèles d'essais de petites tailles (comme les N-1M et N-9M), le premier vol d'une aile volante américaine a lieu le 25 juin 1946, suite au décollage du XB-35. Toutefois, le programme prend de nombreux retards suite à la complexité des quatre moteurs à hélices contrarotatives. Des essais ont lieu avec des moteurs plus classiques, avec une seule hélice mais les essais ne sont pas concluants. Jack Northrop décide alors de complètement changer d'approche et d'utiliser des moteurs à réaction. Il modifie légèrement le XB-35 pour lui ajouter les huit moteurs Allison TG-180 (J35) ; c'est le début du XB-49. Il décolle pour la toute première fois le 21 octobre 1947 et s'annonce extrêmement bien manœuvrant. L'US Air Force est alors
, et notamment du YB-35 à rotors contrarotatifs. Cependant, les moteurs posent de nombreux soucis et la solution de moteurs avec une hélice ne sont pas suffisant ; il faut une nouvelle motorisation. C'est ainsi qu'un YB-35 est modifié pour recevoir six réacteurs Allison J-35, c'est la naissance du YB-49. Toutefois, le concept est beaucoup trop avancé pour l'époque qui ne dispose pas de la technologie suffisante pour suivre avec ce concept révolutionnaire. De plus, les technologies utilisées sont très complexes et donc coûteuses.
Les commandes avancées par l'USAF sont finalement annulées en faveur du géant mais beaucoup plus classique B-36 Peacemaker de Convair. Jack Northrop décide de s'éloigner de son entreprise mais garde toujours un intérêt pour le concept de l'aile volante.
Un nouveau concept arrive
Le début de la guerre froide au sein de l'aéronautique militaire est avant tout une question de vitesse et puis d'altitude. L'arrivée des radars à très longue portée, des avions à réactions de plus en plus rapide mais surtout des systèmes de missiles antiaériens demandent l'arrivée d'un nouveau concept au sein de l'USAF : la furtivité. C'est ainsi qu’apparaissent le prototype Have Blue (premier vol en 1977) et du F-117 (premier vol en 1981) de Lockheed. L'étape suivante étant le lancement d'un programme de bombardier stratégique furtif à long rayon d'action (ATB).
L'un des projets les plus secrets...
L'ATB est lancé à la fin des années 1970, avec le choix du projet de Northrop en 1981. Il s'agit alors d'un des programmes les plus secrets aux États-Unis. Par exemple, le très puissant Government Accountbility Office (GAO, équivalent de la Cour des comptes en France) et les membres du Congrès disposent tous de très faibles informations et sont tous tenus au secret le plus strict.
... et une visite inattendue !
En avril 1980, alors que la compétition autour du programme ATB n'est toujours pas tranchée, une visite spéciale a été organisée au sein de Skunk Works (département de recherche avancée de Lockheed Martin), et plus particulièrement dans les bureaux responsables de ce qui deviendra le futur B-2 Spirit. Cette visite est tenue secrète car il faut obtenir une accréditation très élevée, demandant un certain temps, chose que le visiteur manquait, du haut de ses 84 ans : avec la complicité des développeurs et du service de sécurité, Northrop a décidé de montrer le projet du B-2 au fondateur de l'aile volante américaine, Jack Northrop. Dans une vidéo de 2018, John Cashen, l'une des têtes pensantes du programme était présent durant cette rencontre : "[...] Jack [Northrop] a ouvert une boite [de la taille d'une boite à cigare] et a pris le petit modèle du B-2 qui était à l'intérieur. Des larmes ont coulé de ses yeux et il leur a dit : Maintenant, je sais pourquoi Dieu m'a gardé en vie pendant 25 ans."
Le B-2 Spirit
Premiers pas dans l'USAF
L'avion décolle pour la première fois le 22 novembre 1988 et le 17 décembre 1993, l'USAF reçoit son premier B-2, dénommé Spirit Of Missouri. Les B-2 s'avèrent très utiles dans des missions de pénétrations de zone de zones fortement défendues grâce à leur grande furtivité (bien supérieure aux F-117) tout en combinant un rayon d'action énorme. Ainsi, durant l'opération Allied Force de 1999, les B-2 détruisent 33 % des cibles Serbes en volant sans arrêt entre leur base de Whiteman (Missouri, États-Unis) et les Balkans.
Une mission record
Toutefois, durant la seconde nuit (8 octobre), le Major Melvin G. Deaile et le Capitaine Brian Neal pilotent le B-2 Spirit of America pendant 44 heures et 20 minutes, établissant un record absolu. Cette allonge s'explique par le besoin de passer plusieurs fois au dessus de certaines cibles afin que l'ordinateur de bord puisse créer une carte 3D autour de certaines cibles afin de d'effectuer un bombardement plus précis. Après avoir triaté les différentes cibles avec 12 JDAM (sur un total de 16), ils ont effectué leur dernier ravitaillement. Cependant, le Centre des Opérations Aériennes Combinées (CAOC) a décidé de détourner l'appareil vers l'Afghanistant afin de traiter une dernière coble prioritaire avec ses quatre bombes restantes. Enfin, après un septième et définitif ravitaillement en vol, l'avion a dû cercler autour de Diego Garcia car un B-52 était sur le point d'atterrir.
Cette mission est terminée pour les deux pilotes mais pas pour l'appareil : le tarmac de Diego Garcia est rempli de B-1 et B-52 et il n'y a pas de place pour les B-2. De fait, l'avion est ravitaillé au sol alors que ces moteurs continuent de tourner et deux nouveaux pilotes prennent en main Spirit of America. L'avion atterri coupe ses moteurs sur sa base mère de Whiteman après une opération qui aura durer 70 heures sans aucun arrêt moteur.
Le B-2 est construit par Northrop Grumman et divers sous-traitant (Boeing Military, Hugues Radar Systems, General Electric et Vought Aircraft). Il utilise quatre réacteurs F118-GE-100 (d'une poussée de 7,8 tonnes chacun). Il s'agit d'un avion très large (52,12 mètres pour 20,9 mètres de long et 5,1 mètres de haut). Sa masse maximale est de 152,6 tonnes (18,1 tonnes d'armement et 75,75 tonnes de kérosène). Les deux membres d'équipages sont entrainés aux longs vols et disposent à cet effet d'un lit, d'une toilette et d'un petit compartiment cuisine. En cas d'éjection, c'est tout le compartiment cockpit qui est projeté en dehors de l'appareil. La vitesse (subsonique) et sa distance de franchissement (intercontinentale) sont classées. L'USAF dispose de 19 avions opérationnels ainsi qu'un avion spécialisé dans les essais des mises à jours pour la flotte de B-2. Au départ, la flotte était de 21 avions mais Spirit of Kansas a été totalement détruit le 23 février 2008 après avoir raté son décollage. Un appareil est d'ailleurs sorti de piste en septembre 2021 (article sur le sujet) et le rapport d'enquête a été publié en mars 2022 (plus d'infos dans cet article).
A terme, les B-2 Spirit seront remplacés par le B-21 Raider, dont le premier vol est estimé pour 2023 (article centré sur le sujet).
Le rêve d'un homme
A la fin des années 1930, Jack Northrop cherche à développer un nouveau type d'avion de combat pour ce qui deviendra l'actuelle Force aérienne américaine (USAF) : il veut un avion combinant une portance maximale et une faible trainée. C'est le début de l'aile volante aux États-Unis. En dehors de modèles d'essais de petites tailles (comme les N-1M et N-9M), le premier vol d'une aile volante américaine a lieu le 25 juin 1946, suite au décollage du XB-35. Toutefois, le programme prend de nombreux retards suite à la complexité des quatre moteurs à hélices contrarotatives. Des essais ont lieu avec des moteurs plus classiques, avec une seule hélice mais les essais ne sont pas concluants. Jack Northrop décide alors de complètement changer d'approche et d'utiliser des moteurs à réaction. Il modifie légèrement le XB-35 pour lui ajouter les huit moteurs Allison TG-180 (J35) ; c'est le début du XB-49. Il décolle pour la toute première fois le 21 octobre 1947 et s'annonce extrêmement bien manœuvrant. L'US Air Force est alors
, et notamment du YB-35 à rotors contrarotatifs. Cependant, les moteurs posent de nombreux soucis et la solution de moteurs avec une hélice ne sont pas suffisant ; il faut une nouvelle motorisation. C'est ainsi qu'un YB-35 est modifié pour recevoir six réacteurs Allison J-35, c'est la naissance du YB-49. Toutefois, le concept est beaucoup trop avancé pour l'époque qui ne dispose pas de la technologie suffisante pour suivre avec ce concept révolutionnaire. De plus, les technologies utilisées sont très complexes et donc coûteuses.
Les commandes avancées par l'USAF sont finalement annulées en faveur du géant mais beaucoup plus classique B-36 Peacemaker de Convair. Jack Northrop décide de s'éloigner de son entreprise mais garde toujours un intérêt pour le concept de l'aile volante.
Un nouveau concept arrive
Le début de la guerre froide au sein de l'aéronautique militaire est avant tout une question de vitesse et puis d'altitude. L'arrivée des radars à très longue portée, des avions à réactions de plus en plus rapide mais surtout des systèmes de missiles antiaériens demandent l'arrivée d'un nouveau concept au sein de l'USAF : la furtivité. C'est ainsi qu’apparaissent le prototype Have Blue (premier vol en 1977) et du F-117 (premier vol en 1981) de Lockheed. L'étape suivante étant le lancement d'un programme de bombardier stratégique furtif à long rayon d'action (ATB).
L'un des projets les plus secrets...
L'ATB est lancé à la fin des années 1970, avec le choix du projet de Northrop en 1981. Il s'agit alors d'un des programmes les plus secrets aux États-Unis. Par exemple, le très puissant Government Accountbility Office (GAO, équivalent de la Cour des comptes en France) et les membres du Congrès disposent tous de très faibles informations et sont tous tenus au secret le plus strict.
... et une visite inattendue !
En avril 1980, alors que la compétition autour du programme ATB n'est toujours pas tranchée, une visite spéciale a été organisée au sein de Skunk Works (département de recherche avancée de Lockheed Martin), et plus particulièrement dans les bureaux responsables de ce qui deviendra le futur B-2 Spirit. Cette visite est tenue secrète car il faut obtenir une accréditation très élevée, demandant un certain temps, chose que le visiteur manquait, du haut de ses 84 ans : avec la complicité des développeurs et du service de sécurité, Northrop a décidé de montrer le projet du B-2 au fondateur de l'aile volante américaine, Jack Northrop. Dans une vidéo de 2018, John Cashen, l'une des têtes pensantes du programme était présent durant cette rencontre : "[...] Jack [Northrop] a ouvert une boite [de la taille d'une boite à cigare] et a pris le petit modèle du B-2 qui était à l'intérieur. Des larmes ont coulé de ses yeux et il leur a dit : Maintenant, je sais pourquoi Dieu m'a gardé en vie pendant 25 ans."
Le B-2 Spirit
Premiers pas dans l'USAF
L'avion décolle pour la première fois le 22 novembre 1988 et le 17 décembre 1993, l'USAF reçoit son premier B-2, dénommé Spirit Of Missouri. Les B-2 s'avèrent très utiles dans des missions de pénétrations de zone de zones fortement défendues grâce à leur grande furtivité (bien supérieure aux F-117) tout en combinant un rayon d'action énorme. Ainsi, durant l'opération Allied Force de 1999, les B-2 détruisent 33 % des cibles Serbes en volant sans arrêt entre leur base de Whiteman (Missouri, États-Unis) et les Balkans.
Une mission record
Toutefois, durant la seconde nuit (8 octobre), le Major Melvin G. Deaile et le Capitaine Brian Neal pilotent le B-2 Spirit of America pendant 44 heures et 20 minutes, établissant un record absolu. Cette allonge s'explique par le besoin de passer plusieurs fois au dessus de certaines cibles afin que l'ordinateur de bord puisse créer une carte 3D autour de certaines cibles afin de d'effectuer un bombardement plus précis. Après avoir triaté les différentes cibles avec 12 JDAM (sur un total de 16), ils ont effectué leur dernier ravitaillement. Cependant, le Centre des Opérations Aériennes Combinées (CAOC) a décidé de détourner l'appareil vers l'Afghanistant afin de traiter une dernière coble prioritaire avec ses quatre bombes restantes. Enfin, après un septième et définitif ravitaillement en vol, l'avion a dû cercler autour de Diego Garcia car un B-52 était sur le point d'atterrir.
Cette mission est terminée pour les deux pilotes mais pas pour l'appareil : le tarmac de Diego Garcia est rempli de B-1 et B-52 et il n'y a pas de place pour les B-2. De fait, l'avion est ravitaillé au sol alors que ces moteurs continuent de tourner et deux nouveaux pilotes prennent en main Spirit of America. L'avion atterri coupe ses moteurs sur sa base mère de Whiteman après une opération qui aura durer 70 heures sans aucun arrêt moteur.
Le B-2 est construit par Northrop Grumman et divers sous-traitant (Boeing Military, Hugues Radar Systems, General Electric et Vought Aircraft). Il utilise quatre réacteurs F118-GE-100 (d'une poussée de 7,8 tonnes chacun). Il s'agit d'un avion très large (52,12 mètres pour 20,9 mètres de long et 5,1 mètres de haut). Sa masse maximale est de 152,6 tonnes (18,1 tonnes d'armement et 75,75 tonnes de kérosène). Les deux membres d'équipages sont entrainés aux longs vols et disposent à cet effet d'un lit, d'une toilette et d'un petit compartiment cuisine. En cas d'éjection, c'est tout le compartiment cockpit qui est projeté en dehors de l'appareil. La vitesse (subsonique) et sa distance de franchissement (intercontinentale) sont classées. L'USAF dispose de 19 avions opérationnels ainsi qu'un avion spécialisé dans les essais des mises à jours pour la flotte de B-2. Au départ, la flotte était de 21 avions mais Spirit of Kansas a été totalement détruit le 23 février 2008 après avoir raté son décollage. Un appareil est d'ailleurs sorti de piste en septembre 2021 (article sur le sujet) et le rapport d'enquête a été publié en mars 2022 (plus d'infos dans cet article).
A terme, les B-2 Spirit seront remplacés par le B-21 Raider, dont le premier vol est estimé pour 2023 (article centré sur le sujet).
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