Un avion de patrouille maritime français pris à partie par un système antiaérien russe
Un avion de patrouille maritime français pris à partie par un système antiaérien russe
© USAF

publié le 20 janvier 2025 à 18:17

1377 mots

Un avion de patrouille maritime français pris à partie par un système antiaérien russe

Alors qu’il patrouillait en mer Baltique, un avion de patrouille maritime Atlantique 2 a été pris à partie par un radar d’engagement d’une batterie S-400 russe. Si aucun missile ne fut tiré, cette nouvelle tentative de déstabilisation russe reste tout de même la dernière étape avant le tir effectif des missiles antiaériens depuis les lanceurs de cette même batterie.


Retour de patrouille en mer Baltique pour un Atlantique 2 français. Durant ce vol, il sera illuminé par un radar d'engagement d'une batterie S-400 russe.
Retour de patrouille en mer Baltique pour un Atlantique 2 français. Durant ce vol, il sera illuminé par un radar d'engagement d'une batterie S-400 russe. © Air&Cosmos, ADS-B
Retour de patrouille en mer Baltique pour un Atlantique 2 français. Durant ce vol, il sera illuminé par un radar d'engagement d'une batterie S-400 russe.

Cap à l'Est pour l'Aéronautique navale

Le 14 janvier à 10h31, un avion de patrouille maritime Atlantique 2 de l'Aéronautique navale montait en altitude après avoir décoller de la base de l'Aéronautique navale de Lann-Biouhé (Morbihan, France). Il ne reviendra que le lendemain matin, peu après 02h39. Les sites de live tracking permettent de suivre une partie du vol de l'appareil, engagé dans le cadre de la mission Baltic Sentry. Celle-ci vise à surveiller les agissements de navires et sous-marins dans cette zone afin d'éviter de nouveaux dégâts sur des câbles sous-marins.

Mais comme expliqué dans une publication sur X par Sébastien Lecornu, ministre des Armées, l'équipage a eu "très chaud" pendant quelques minutes : le radar de conduite de tir d'une batterie antiaérienne longue portée a illuminé l'avion de patrouille maritime français alors même que ce dernier volait bien loin de l'espace aérien russe.

Une déstabilisation grave

Pour saisir la signification de cette manœuvre, il faut comprendre le fonctionnement basique d'une batterie antiaérienne S-400 (SA-21 Growler) et de sa composition. En premier lieu, la batterie doit pouvoir détecter tous les avions, hélicoptères, missiles et drones. Cette mission est attribuée à un radar d'acquisition, comme l'énorme 91N6 (Big Bird) ou encore le 96L6 (Cheese Board) au sein des batteries S-400. La détection est alors transmise au poste de commandement de la batterie. Jusqu'ici, l'Atlantique 2 ne risque rien du tout, tout comme les nombreux avions civils ou militaires survolant la Baltique. Cependant, le poste de commandement a décidé d'enclencher un radar d'engagement/de conduite de tir, très certainement un 92N6 (Grave Stone). Et c'est cette action qu'il faut relever comme extrêmement importante car un radar de conduite de tir n'a qu'un seul et unique but : guider les missiles sol-air de la batterie vers la cible visée/illuminée par ce même radar. Ainsi, il s'agissait purement et tout simplement de la dernière étape avant le tir de missiles antiaériens pour éventuellement abattre l'Atlantique 2. Heureusement, aucun départ de missile n'a été détecté : la manœuvre était une nouvelle fois déstabilisatrice et reste sous le seuil de ce qui pourrait être qualifié d'un acte de guerre. Toutefois, ce seuil n'était pas si éloigné que ça, d'où la dangerosité avérée et dénoncée de la manœuvre en question.

Radar de détection longue portée russe 91N6A Big Bird déployé lors d'un exercice de tir d'une batterie antiaérienne longue portée S-400 (30 janvier 2024).
Radar de détection longue portée russe 91N6A Big Bird déployé lors d'un exercice de tir d'une batterie antiaérienne longue portée S-400 (30 janvier 2024). © Mil.ru
Radar de détection longue portée russe 91N6A Big Bird déployé lors d'un exercice de tir d'une batterie antiaérienne longue portée S-400 (30 janvier 2024).

À noter que les exemples de radars cités ci-dessus ne comprennent pas les nombreux radars pouvant compléter une batterie S-400 russe. Il y a par exemple la possibilité d'ajouter des mâts mobiles 40V6M. Ceux-ci sont alors équipés à leur sommet d'un radar d'acquisition 96L6 ou d'engagement 92N6. L'intérêt est de pouvoir contrer les effets bloquant de la courbure de la terre, des forêts, montagnes, vallées,... bref, obstacles naturels. Ainsi, un mât équipé d'un radar d'acquisition permettra une détection plus lointaines de cibles potentielles volant en très basse altitude. Dans le cas d'un radar d'engagement, c'est le guidage des missiles qui pourra être effectué à plus longue portée par rapport au même radar d'engagement situé au sol.

En dehors des mâts, il y a aussi le très récent Podlet-K1, entré en service à partir de 2018 au sein des Forces armées russes. Ce dernier avait fait la une de actualité quand des rebelles syriens en avait capturé un exemplaire intact en décembre dernier. Et la liste continue avec les radars de détection 56N6, 67N6 (en mobile ou sur mât), Nebo-M (trois antennes possibles : RLM-M, RLM-D ou RLM-S),...

Système radar mobile Podlet-K1 (produit et développé en Russie, mât replié) capturé intact par des groupes rebelles en Syrie (4 décembre 2024).
Système radar mobile Podlet-K1 (produit et développé en Russie, mât replié) capturé intact par des groupes rebelles en Syrie (4 décembre 2024). © Open sources
Système radar mobile Podlet-K1 (produit et développé en Russie, mât replié) capturé intact par des groupes rebelles en Syrie (4 décembre 2024).

Le couteau suisse français

Déployé dans le cadre de la mission Baltic Sentry, ses différents capteurs lui ont permis de surveiller les différents mouvements maritimes et sous-marins pour faire face aux menaces qui pèsent sur les infrastructures sous-marines critiques (câbles électriques, câbles de transfert de données,...). Or, cet appareil est justement spécialisé en premier lieu pour les missions de patrouille et de surveillance maritimes :

  • le long mât qui se trouve derrière la queue de l'appareil renferme un détecteur d'anomalie magnétique (MAD). Il permet à l'avion de détecter la présence d'une masse métallique se trouvant sous l'eau, comme une épave... ou un sous-marin !
  • l'Atlantique 2 est aussi équipé de bouées sonars. Elles sont larguées depuis l'arrière de l'avion, ralenties par un parachute, se déploient ensuite une fois dans l'eau et émettent des informations vers l'avion. Elles peuvent être passives (écoute uniquement) ou actives (émission et détection)... en attendant la future SonoFlash de Thales avec deux modes pour une seule et même bouée sonar (mode actif et mode passif).
  • la détection est aussi assurée en surface par un radar Searchmaster, également développé et produit par Thales. Il est placé dans une bulle (peinte en noir), sous le ventre de l'avion et est déployée durant le vol. C'est une antenne AESA, en bande X, avec une rotation à 360° ou en secteurs. En plus d'offrir une situation maritime et côtière élargie, il peut aussi être utilisé dans un mode de visualisation des cibles mobiles (Moving Target Indication, MTI) pour offrir une image radar d'une zone et ce, quel que soit la météo. Concrètement, il peut détecter des cibles à terre, en mer (y compris un périscope) mais aussi en vol.
Décollage d'un avion de patrouille maritime Atlantique 2 en Asie du sud-ouest dans le cadre de l'opération Inherent Resolve (10 février 2017).
Décollage d'un avion de patrouille maritime Atlantique 2 en Asie du sud-ouest dans le cadre de l'opération Inherent Resolve (10 février 2017). © USAF
Décollage d'un avion de patrouille maritime Atlantique 2 en Asie du sud-ouest dans le cadre de l'opération Inherent Resolve (10 février 2017).
  • les yeux de l'avion sont concentrés dans la boule électro-optique Wescam MX-20 de L3Harris. Elle emporte jusqu'à 7 capteurs différents, offrant une vue jour, infrarouge ou encore un désignateur laser. Elle se trouve sous le ventre de l'appareil, juste derrière la soute et à côté du lance-bouées sonars.
  • le nez vitré permet à un opérateur muni d'un appareil photo d'également offrir des images de haute qualité pour éventuellement mettre à jour les bases de données militaires ou prendre en flagrant délit un navire.
  • capacité de recherche et de sauvetage en mer, avec la possibilité de larguer une chaine SAR complète (avec un bateau gonflable) depuis sa soute.
Schéma de la modernisation de l'avion de patrouille maritime Atlantique 2 en service au sein de l'Aéronautique navale.
Schéma de la modernisation de l'avion de patrouille maritime Atlantique 2 en service au sein de l'Aéronautique navale. © @MarineNationale
Schéma de la modernisation de l'avion de patrouille maritime Atlantique 2 en service au sein de l'Aéronautique navale.

Si ces capacités sont logiques pour un avion de patrouille maritime, ce dernier dispose aussi d'autres capacités, faisant de cet avion un véritable couteau suisse pour les Forces armées françaises :

  • largage de torpilles, missiles antinavires... mais aussi de bombes air-sol,
  • appui indirect aux troupes au sol via une reconnaissance de zone,
  • les petits carénages situés au bout des ailes et la petite bulle sur la dérive font partie du système Electronique Sensor Mesure (ESM), offrant à l'appareil une capacité de détection, d'identification et de localisation des radars à très large bande à longue distance (ELINT).

Cette capacité ELINT a très certainement été intéressante pour la mission du 15 janvier, de nombreux radars militaires étant déployés à Kaliningrad. C'est même plus que probablement grâce à cette capacité que le type de batterie antiaérienne russe est connu. Cependant, il ne s'agit pas non plus d'un avion dédié à la reconnaissance électromagnétique (SIGINT). Il n'est en rien comparable avec des avions dédiés à ce genre de mission : les anciens C-160G Gabriel et les futurs Archange français ou encore les stratégiques RC-135V/W Rivet Joint et RC-135U Combat Sent américains. À titre d'exemple, sur les 8 personnes dans la cabine (derrière le cockpit) d'un Atlantique 2, seulement une seule s'occupe de la capacité ELINT. En revanche, la cabine d'un Rivet Joint accueille jusqu'à 17 personnes en charge des différents moyens ELINT et COMINT.

(de dr. à g.) Opérateurs radar, ESM et radio dans la cabine d'un avion de patrouille maritime Atlantique 2.
(de dr. à g.) Opérateurs radar, ESM et radio dans la cabine d'un avion de patrouille maritime Atlantique 2. © @MarineNationale
(de dr. à g.) Opérateurs radar, ESM et radio dans la cabine d'un avion de patrouille maritime Atlantique 2.

Un autre avion sur zone

Enfin, le 15 janvier, un autre avion français survolait la région. Il s'agissait d'un plus discret Avion Léger de Surveillance et de Reconnaissance (ALSR), surnommé Vador. Comme son nom l'indique, il s'agit d'un avion léger, un Beechcraft King Air 350, modifié pour assurer des missions de reconnaissance grâce à des capteurs SIGINT et IMINT sous son ventre. Cependant, au moment où l'Atlantique 2 commençait à survoler la mer Baltique, l'ALSR survolait la Pologne en longeant la frontière biélorusse. Il est donc fort peu probable qu'il ait pu capter une émission en lien avec l'accrochage radar de la batterie S-400 russe.

Au moment où l'Atlantique 2 entrait en mer Baltique, l'ALSR Vador avait terminé sa patrouille autour de Kaliningrad et se concentrait sur la Biélorussie.
Au moment où l'Atlantique 2 entrait en mer Baltique, l'ALSR Vador avait terminé sa patrouille autour de Kaliningrad et se concentrait sur la Biélorussie. © Air&Cosmos, ADS-B
Au moment où l'Atlantique 2 entrait en mer Baltique, l'ALSR Vador avait terminé sa patrouille autour de Kaliningrad et se concentrait sur la Biélorussie.
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20/01/2025 18:17
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Un avion de patrouille maritime français pris à partie par un système antiaérien russe

Alors qu’il patrouillait en mer Baltique, un avion de patrouille maritime Atlantique 2 a été pris à partie par un radar d’engagement d’une batterie S-400 russe. Si aucun missile ne fut tiré, cette nouvelle tentative de déstabilisation russe reste tout de même la dernière étape avant le tir effectif des missiles antiaériens depuis les lanceurs de cette même batterie.

Un avion de patrouille maritime français pris à partie par un système antiaérien russe
Un avion de patrouille maritime français pris à partie par un système antiaérien russe

Retour de patrouille en mer Baltique pour un Atlantique 2 français. Durant ce vol, il sera illuminé par un radar d'engagement d'une batterie S-400 russe.
Retour de patrouille en mer Baltique pour un Atlantique 2 français. Durant ce vol, il sera illuminé par un radar d'engagement d'une batterie S-400 russe. © Air&Cosmos, ADS-B
Retour de patrouille en mer Baltique pour un Atlantique 2 français. Durant ce vol, il sera illuminé par un radar d'engagement d'une batterie S-400 russe.

Cap à l'Est pour l'Aéronautique navale

Le 14 janvier à 10h31, un avion de patrouille maritime Atlantique 2 de l'Aéronautique navale montait en altitude après avoir décoller de la base de l'Aéronautique navale de Lann-Biouhé (Morbihan, France). Il ne reviendra que le lendemain matin, peu après 02h39. Les sites de live tracking permettent de suivre une partie du vol de l'appareil, engagé dans le cadre de la mission Baltic Sentry. Celle-ci vise à surveiller les agissements de navires et sous-marins dans cette zone afin d'éviter de nouveaux dégâts sur des câbles sous-marins.

Mais comme expliqué dans une publication sur X par Sébastien Lecornu, ministre des Armées, l'équipage a eu "très chaud" pendant quelques minutes : le radar de conduite de tir d'une batterie antiaérienne longue portée a illuminé l'avion de patrouille maritime français alors même que ce dernier volait bien loin de l'espace aérien russe.

Une déstabilisation grave

Pour saisir la signification de cette manœuvre, il faut comprendre le fonctionnement basique d'une batterie antiaérienne S-400 (SA-21 Growler) et de sa composition. En premier lieu, la batterie doit pouvoir détecter tous les avions, hélicoptères, missiles et drones. Cette mission est attribuée à un radar d'acquisition, comme l'énorme 91N6 (Big Bird) ou encore le 96L6 (Cheese Board) au sein des batteries S-400. La détection est alors transmise au poste de commandement de la batterie. Jusqu'ici, l'Atlantique 2 ne risque rien du tout, tout comme les nombreux avions civils ou militaires survolant la Baltique. Cependant, le poste de commandement a décidé d'enclencher un radar d'engagement/de conduite de tir, très certainement un 92N6 (Grave Stone). Et c'est cette action qu'il faut relever comme extrêmement importante car un radar de conduite de tir n'a qu'un seul et unique but : guider les missiles sol-air de la batterie vers la cible visée/illuminée par ce même radar. Ainsi, il s'agissait purement et tout simplement de la dernière étape avant le tir de missiles antiaériens pour éventuellement abattre l'Atlantique 2. Heureusement, aucun départ de missile n'a été détecté : la manœuvre était une nouvelle fois déstabilisatrice et reste sous le seuil de ce qui pourrait être qualifié d'un acte de guerre. Toutefois, ce seuil n'était pas si éloigné que ça, d'où la dangerosité avérée et dénoncée de la manœuvre en question.

Radar de détection longue portée russe 91N6A Big Bird déployé lors d'un exercice de tir d'une batterie antiaérienne longue portée S-400 (30 janvier 2024).
Radar de détection longue portée russe 91N6A Big Bird déployé lors d'un exercice de tir d'une batterie antiaérienne longue portée S-400 (30 janvier 2024). © Mil.ru
Radar de détection longue portée russe 91N6A Big Bird déployé lors d'un exercice de tir d'une batterie antiaérienne longue portée S-400 (30 janvier 2024).

À noter que les exemples de radars cités ci-dessus ne comprennent pas les nombreux radars pouvant compléter une batterie S-400 russe. Il y a par exemple la possibilité d'ajouter des mâts mobiles 40V6M. Ceux-ci sont alors équipés à leur sommet d'un radar d'acquisition 96L6 ou d'engagement 92N6. L'intérêt est de pouvoir contrer les effets bloquant de la courbure de la terre, des forêts, montagnes, vallées,... bref, obstacles naturels. Ainsi, un mât équipé d'un radar d'acquisition permettra une détection plus lointaines de cibles potentielles volant en très basse altitude. Dans le cas d'un radar d'engagement, c'est le guidage des missiles qui pourra être effectué à plus longue portée par rapport au même radar d'engagement situé au sol.

En dehors des mâts, il y a aussi le très récent Podlet-K1, entré en service à partir de 2018 au sein des Forces armées russes. Ce dernier avait fait la une de actualité quand des rebelles syriens en avait capturé un exemplaire intact en décembre dernier. Et la liste continue avec les radars de détection 56N6, 67N6 (en mobile ou sur mât), Nebo-M (trois antennes possibles : RLM-M, RLM-D ou RLM-S),...

Système radar mobile Podlet-K1 (produit et développé en Russie, mât replié) capturé intact par des groupes rebelles en Syrie (4 décembre 2024).
Système radar mobile Podlet-K1 (produit et développé en Russie, mât replié) capturé intact par des groupes rebelles en Syrie (4 décembre 2024). © Open sources
Système radar mobile Podlet-K1 (produit et développé en Russie, mât replié) capturé intact par des groupes rebelles en Syrie (4 décembre 2024).

Le couteau suisse français

Déployé dans le cadre de la mission Baltic Sentry, ses différents capteurs lui ont permis de surveiller les différents mouvements maritimes et sous-marins pour faire face aux menaces qui pèsent sur les infrastructures sous-marines critiques (câbles électriques, câbles de transfert de données,...). Or, cet appareil est justement spécialisé en premier lieu pour les missions de patrouille et de surveillance maritimes :

  • le long mât qui se trouve derrière la queue de l'appareil renferme un détecteur d'anomalie magnétique (MAD). Il permet à l'avion de détecter la présence d'une masse métallique se trouvant sous l'eau, comme une épave... ou un sous-marin !
  • l'Atlantique 2 est aussi équipé de bouées sonars. Elles sont larguées depuis l'arrière de l'avion, ralenties par un parachute, se déploient ensuite une fois dans l'eau et émettent des informations vers l'avion. Elles peuvent être passives (écoute uniquement) ou actives (émission et détection)... en attendant la future SonoFlash de Thales avec deux modes pour une seule et même bouée sonar (mode actif et mode passif).
  • la détection est aussi assurée en surface par un radar Searchmaster, également développé et produit par Thales. Il est placé dans une bulle (peinte en noir), sous le ventre de l'avion et est déployée durant le vol. C'est une antenne AESA, en bande X, avec une rotation à 360° ou en secteurs. En plus d'offrir une situation maritime et côtière élargie, il peut aussi être utilisé dans un mode de visualisation des cibles mobiles (Moving Target Indication, MTI) pour offrir une image radar d'une zone et ce, quel que soit la météo. Concrètement, il peut détecter des cibles à terre, en mer (y compris un périscope) mais aussi en vol.
Décollage d'un avion de patrouille maritime Atlantique 2 en Asie du sud-ouest dans le cadre de l'opération Inherent Resolve (10 février 2017).
Décollage d'un avion de patrouille maritime Atlantique 2 en Asie du sud-ouest dans le cadre de l'opération Inherent Resolve (10 février 2017). © USAF
Décollage d'un avion de patrouille maritime Atlantique 2 en Asie du sud-ouest dans le cadre de l'opération Inherent Resolve (10 février 2017).
  • les yeux de l'avion sont concentrés dans la boule électro-optique Wescam MX-20 de L3Harris. Elle emporte jusqu'à 7 capteurs différents, offrant une vue jour, infrarouge ou encore un désignateur laser. Elle se trouve sous le ventre de l'appareil, juste derrière la soute et à côté du lance-bouées sonars.
  • le nez vitré permet à un opérateur muni d'un appareil photo d'également offrir des images de haute qualité pour éventuellement mettre à jour les bases de données militaires ou prendre en flagrant délit un navire.
  • capacité de recherche et de sauvetage en mer, avec la possibilité de larguer une chaine SAR complète (avec un bateau gonflable) depuis sa soute.
Schéma de la modernisation de l'avion de patrouille maritime Atlantique 2 en service au sein de l'Aéronautique navale.
Schéma de la modernisation de l'avion de patrouille maritime Atlantique 2 en service au sein de l'Aéronautique navale. © @MarineNationale
Schéma de la modernisation de l'avion de patrouille maritime Atlantique 2 en service au sein de l'Aéronautique navale.

Si ces capacités sont logiques pour un avion de patrouille maritime, ce dernier dispose aussi d'autres capacités, faisant de cet avion un véritable couteau suisse pour les Forces armées françaises :

  • largage de torpilles, missiles antinavires... mais aussi de bombes air-sol,
  • appui indirect aux troupes au sol via une reconnaissance de zone,
  • les petits carénages situés au bout des ailes et la petite bulle sur la dérive font partie du système Electronique Sensor Mesure (ESM), offrant à l'appareil une capacité de détection, d'identification et de localisation des radars à très large bande à longue distance (ELINT).

Cette capacité ELINT a très certainement été intéressante pour la mission du 15 janvier, de nombreux radars militaires étant déployés à Kaliningrad. C'est même plus que probablement grâce à cette capacité que le type de batterie antiaérienne russe est connu. Cependant, il ne s'agit pas non plus d'un avion dédié à la reconnaissance électromagnétique (SIGINT). Il n'est en rien comparable avec des avions dédiés à ce genre de mission : les anciens C-160G Gabriel et les futurs Archange français ou encore les stratégiques RC-135V/W Rivet Joint et RC-135U Combat Sent américains. À titre d'exemple, sur les 8 personnes dans la cabine (derrière le cockpit) d'un Atlantique 2, seulement une seule s'occupe de la capacité ELINT. En revanche, la cabine d'un Rivet Joint accueille jusqu'à 17 personnes en charge des différents moyens ELINT et COMINT.

(de dr. à g.) Opérateurs radar, ESM et radio dans la cabine d'un avion de patrouille maritime Atlantique 2.
(de dr. à g.) Opérateurs radar, ESM et radio dans la cabine d'un avion de patrouille maritime Atlantique 2. © @MarineNationale
(de dr. à g.) Opérateurs radar, ESM et radio dans la cabine d'un avion de patrouille maritime Atlantique 2.

Un autre avion sur zone

Enfin, le 15 janvier, un autre avion français survolait la région. Il s'agissait d'un plus discret Avion Léger de Surveillance et de Reconnaissance (ALSR), surnommé Vador. Comme son nom l'indique, il s'agit d'un avion léger, un Beechcraft King Air 350, modifié pour assurer des missions de reconnaissance grâce à des capteurs SIGINT et IMINT sous son ventre. Cependant, au moment où l'Atlantique 2 commençait à survoler la mer Baltique, l'ALSR survolait la Pologne en longeant la frontière biélorusse. Il est donc fort peu probable qu'il ait pu capter une émission en lien avec l'accrochage radar de la batterie S-400 russe.

Au moment où l'Atlantique 2 entrait en mer Baltique, l'ALSR Vador avait terminé sa patrouille autour de Kaliningrad et se concentrait sur la Biélorussie.
Au moment où l'Atlantique 2 entrait en mer Baltique, l'ALSR Vador avait terminé sa patrouille autour de Kaliningrad et se concentrait sur la Biélorussie. © Air&Cosmos, ADS-B
Au moment où l'Atlantique 2 entrait en mer Baltique, l'ALSR Vador avait terminé sa patrouille autour de Kaliningrad et se concentrait sur la Biélorussie.


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