Une sonde en quête d’un océan sous la glace d’une lune de Jupiter
Une sonde en quête d’un océan sous la glace d’une lune de Jupiter
© NASA/JPL/Caltech

publié le 20 octobre 2024 à 08:00

684 mots

Une sonde en quête d’un océan sous la glace d’une lune de Jupiter

Le 14 octobre a démarré la première mission destinée à mener une étude détaillée d’Europe, une fascinante lune glacée de Jupiter, dont les profondeurs pourraient malgré tout abriter des environnements propices à la vie.


Une mission à 5 Md$

Alors que le départ de la mission européenne Hera est passé entre les gouttes le 7 octobre, celui de la mission Europa Clipper initialement prévu trois jours plus tard a dû patienter, le temps de laisser passer l’ouragan Milton sur la Floride. C’est finalement le 14 octobre à 16 h 19 UTC que s’est élancé depuis le Centre spatial Kennedy l’un des engins d'exploration les plus lourds jamais envoyés pour explorer le Système solaire : 6 065 kg au décollage (dont 2 750 kg d’ergols). Le lancement devait s’effectuer à l’aide du Falcon Heavy de SpaceX (avec deux étages latéraux d’occasion), le onzième mis en œuvre depuis février 2018, le second cette année (après l’envoi en juin dernier du satellite géostationnaire de télécommunications Goes U de la NOAA), et visiblement le dernier avant 2026. Le lancement, dont le contrat a été attribué en juillet 2021 par la NASA, a été facturé environ 178 M$ (contre 152,5 M$ pour Goes U). Le coût total de la mission, lui, est aujourd’hui estimé à 5 Md$.

 

Des phénomènes intrigants

Europe, la plus petite lune galiléenne et le sixième satellite naturel le plus proche parmi les 95 connus de la planète géante Jupiter, fascine les astronomes depuis que les sondes américaines Voyager 1 et 2 l’ont révélée en 1979 : l'astre le plus lisse du Système solaire (dont plus hauts reliefs n'excèdent pas quelques centaines de mètres) pourrait abriter certainement un océan d'eau liquide sous une couche de glace de plusieurs centaines de kilomètres d'épaisseur. Cet état liquide se maintiendrait grâce aux effets de marées provoquées par la proximité avec Jupiter (à 670 000 km) et par la résonance gravitationnelle avec les trois autres satellites galiléens – Callisto, Ganymède et Io. D’autre part, tout comme sur Encelade, un satellite de Saturne recouvert de neige, il existe sur Europe un système de geysers, des jets de vapeur d'eau s'élevant jusqu'à près de 200 km ayant été observés à plusieurs reprises, notamment par le télescope spatial Hubble. Ainsi, pour les exobiologistes, Europa se présente comme un candidat sérieux à la présence d'une vie primitive, de la même manière que les cheminées hydrothermales découvertes dans les fonds marins terrestres grouillent de vies microbiennes…

 

Une mission nominale de 3,5 ans

Lancée au début d’une fenêtre de trois semaines (la suivante ouvrant en novembre 2025), Europa Clipper effectuera des survols de Mars et de la Terre (pour augmenter sa vitesse par assistance gravitationnelle), en février 2025 et décembre 2026, avant d’arriver aux abords Jupiter en avril 2030. Mais la mission d’Europa Clipper ne démarrera qu’en mai 2031, une fois son orbite ajustée sur une trajectoire permettant de survoler régulièrement Europe à des distances comprises entre 25 et 2 700 km. Les mesures de la mission nominale doivent durer 3,5 ans (45 survols), d’abord au-dessus de la face opposée à Jupiter (sachant qu’Europe présente toujours la même face à la planète), puis au-dessus de la face regardant Jupiter (entre mai 2033 et septembre 2034). Les principaux objectifs de la mission sont de produire des images haute résolution de la surface d'Europe, de déterminer sa composition, de rechercher des signes d'activité géologique récente ou en cours, de mesurer l'épaisseur de la couche de glace, de rechercher des lacs souterrains et de déterminer la profondeur et la salinité de l’océan supposé. Neuf instruments scientifiques sont ainsi embarqués à bord de la sonde.

 

Cocorico

Le vaisseau (qui dispose de 24 propulseurs) mesure environ 5 m de haut. Avec ses panneaux solaires déployés, il s'étend sur environ 30,5 m. Le nom Europa Clipper (Clipper Europe) fait référence aux voiliers légers du XIXe siècle qui empruntaient régulièrement les routes commerciales à travers le monde. Mais la mission s’est d’abord appelée Europa Multiple Flyby Mission (Mission de survol multiple d'Europe). Elle a été recommandée en 2013 par le Conseil national de recherches des États-Unis, tandis que la phase C (conception finale et fabrication) a été engagée par la NASA en août 2019. Le développement a été assuré par le Laboratoire de physique appliquée de l'Université Johns Hopkins de Baltimore, dans le Mayland, en association avec le laboratoire JPL de Pasadena, en Californie.

Fierté nationale, le JPL a choisi en 2018 l’équipementier francilien Sodern pour fournir le viseur d'étoiles de la sonde.

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20/10/2024 08:00
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Une sonde en quête d’un océan sous la glace d’une lune de Jupiter

Le 14 octobre a démarré la première mission destinée à mener une étude détaillée d’Europe, une fascinante lune glacée de Jupiter, dont les profondeurs pourraient malgré tout abriter des environnements propices à la vie.

Une sonde en quête d’un océan sous la glace d’une lune de Jupiter
Une sonde en quête d’un océan sous la glace d’une lune de Jupiter

Une mission à 5 Md$

Alors que le départ de la mission européenne Hera est passé entre les gouttes le 7 octobre, celui de la mission Europa Clipper initialement prévu trois jours plus tard a dû patienter, le temps de laisser passer l’ouragan Milton sur la Floride. C’est finalement le 14 octobre à 16 h 19 UTC que s’est élancé depuis le Centre spatial Kennedy l’un des engins d'exploration les plus lourds jamais envoyés pour explorer le Système solaire : 6 065 kg au décollage (dont 2 750 kg d’ergols). Le lancement devait s’effectuer à l’aide du Falcon Heavy de SpaceX (avec deux étages latéraux d’occasion), le onzième mis en œuvre depuis février 2018, le second cette année (après l’envoi en juin dernier du satellite géostationnaire de télécommunications Goes U de la NOAA), et visiblement le dernier avant 2026. Le lancement, dont le contrat a été attribué en juillet 2021 par la NASA, a été facturé environ 178 M$ (contre 152,5 M$ pour Goes U). Le coût total de la mission, lui, est aujourd’hui estimé à 5 Md$.

 

Des phénomènes intrigants

Europe, la plus petite lune galiléenne et le sixième satellite naturel le plus proche parmi les 95 connus de la planète géante Jupiter, fascine les astronomes depuis que les sondes américaines Voyager 1 et 2 l’ont révélée en 1979 : l'astre le plus lisse du Système solaire (dont plus hauts reliefs n'excèdent pas quelques centaines de mètres) pourrait abriter certainement un océan d'eau liquide sous une couche de glace de plusieurs centaines de kilomètres d'épaisseur. Cet état liquide se maintiendrait grâce aux effets de marées provoquées par la proximité avec Jupiter (à 670 000 km) et par la résonance gravitationnelle avec les trois autres satellites galiléens – Callisto, Ganymède et Io. D’autre part, tout comme sur Encelade, un satellite de Saturne recouvert de neige, il existe sur Europe un système de geysers, des jets de vapeur d'eau s'élevant jusqu'à près de 200 km ayant été observés à plusieurs reprises, notamment par le télescope spatial Hubble. Ainsi, pour les exobiologistes, Europa se présente comme un candidat sérieux à la présence d'une vie primitive, de la même manière que les cheminées hydrothermales découvertes dans les fonds marins terrestres grouillent de vies microbiennes…

 

Une mission nominale de 3,5 ans

Lancée au début d’une fenêtre de trois semaines (la suivante ouvrant en novembre 2025), Europa Clipper effectuera des survols de Mars et de la Terre (pour augmenter sa vitesse par assistance gravitationnelle), en février 2025 et décembre 2026, avant d’arriver aux abords Jupiter en avril 2030. Mais la mission d’Europa Clipper ne démarrera qu’en mai 2031, une fois son orbite ajustée sur une trajectoire permettant de survoler régulièrement Europe à des distances comprises entre 25 et 2 700 km. Les mesures de la mission nominale doivent durer 3,5 ans (45 survols), d’abord au-dessus de la face opposée à Jupiter (sachant qu’Europe présente toujours la même face à la planète), puis au-dessus de la face regardant Jupiter (entre mai 2033 et septembre 2034). Les principaux objectifs de la mission sont de produire des images haute résolution de la surface d'Europe, de déterminer sa composition, de rechercher des signes d'activité géologique récente ou en cours, de mesurer l'épaisseur de la couche de glace, de rechercher des lacs souterrains et de déterminer la profondeur et la salinité de l’océan supposé. Neuf instruments scientifiques sont ainsi embarqués à bord de la sonde.

 

Cocorico

Le vaisseau (qui dispose de 24 propulseurs) mesure environ 5 m de haut. Avec ses panneaux solaires déployés, il s'étend sur environ 30,5 m. Le nom Europa Clipper (Clipper Europe) fait référence aux voiliers légers du XIXe siècle qui empruntaient régulièrement les routes commerciales à travers le monde. Mais la mission s’est d’abord appelée Europa Multiple Flyby Mission (Mission de survol multiple d'Europe). Elle a été recommandée en 2013 par le Conseil national de recherches des États-Unis, tandis que la phase C (conception finale et fabrication) a été engagée par la NASA en août 2019. Le développement a été assuré par le Laboratoire de physique appliquée de l'Université Johns Hopkins de Baltimore, dans le Mayland, en association avec le laboratoire JPL de Pasadena, en Californie.

Fierté nationale, le JPL a choisi en 2018 l’équipementier francilien Sodern pour fournir le viseur d'étoiles de la sonde.



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