APRÈS 40 ANS DE SUPRÉMATIE, LES PLATEFORMES FURTIVES AMÉRICAINES SONT DÉSORMAIS EN PASSE D’ÊTRE CONTESTÉES. NOUVELLE TECHNOLOGIE D’IMAGERIE À LONGUE DISTANCE. UNE TECHNOLOGIE QUI, IRONIE DU SORT, EST D’ORIGINE AMÉRICAINE
Russes et Chinois ont redécouvert les ressources oubliées des radars UHF/VHF pour détecter bombardiers ou drones furtifs
Si Russes et Chinois ont redécouvert les ressources oubliées des radars UHF/VHF pour détecter les bombardiers ou les drones furtifs, ceux-ci n’offrent pas toujours la précision requise pour assurer la conduite de tir des systèmes antiaériens. Pourtant, les pépites technologiques que sont les chasseurs F-22 et F-35, les bombardiers stratégiques B2, les drones, ou encore les missiles de croisière pourraient bien être prochainement menacés par une nouvelle génération de systèmes de vision infrarouge dont la résolution et la portée surpasse bon nombre de radars aéroportés.
Le « BLack Programme » de L’U2.
Au début des années 2000, véritable icône de la guerre froide, l’avion de reconnaissance tactique et stratégique U2, dont le développement remonte aux années 1950, se prépare à une nouvelle modernisation. Une modernisation qui va le doter d’une capacité disruptive pendant près d’une décennie. A l’époque, malgré l’émergence du drone Hale Global Hawk et de ses missions médiatiques lors de la guerre du Kosovo, l’U2 s’avère toujours un irremplaçable instrument de décision, tant pour les décideurs politiques que militaires, lors de toutes les phases d’un conflit.
Car, contrairement aux satellites, avec sa distance franchissable de plus de 10000 km, il est des plus difficile de prévoir ses zones et ses créneaux d’observation. Grâce à son système de charges modulaires, l’avion américain qui se pilote comme un planeur, est truffé de capteurs qui lui permettent de couvrir à plus de 23 km d’altitude tous les types de missions ISR : cartographie de terrain, imagerie de nuit par infrarouge ou au travers des nuages grâce à son radar SAR, écoute des communications adverses, triangulation, détection des essais nucléaires grâce au prélèvement de particules dans l’atmosphère, relais de communication… Encore aujourd’hui, rares sont les systèmes de drones à offrir une telle réactivité.
Car, en dehors des phases de décollage et d’atterrissage, le vol qui est entièrement automatisé permet au pilote de se transformer en opérateur qui, immergé dans l’environnement opérationnel, peut orienter les capteurs avec discernement, et en fonction de l’évolution de la situation sur le terrain. Mais depuis la guerre du Golfe la vocation de l’avion américain évolue désormais vers l’identification et le ciblage en temps réel des systèmes d’armes adverses au profit des commandants sur le champ de bataille. C’est pour cette raison qu’à partir de 1991 une ligne budgétaire protégée finance l’intégration à bord de l’avion d’une caméra optique et infrarouge dotée d’un niveau de performance tant en grossissement qu’en résolution inédit, le SYERS. Un niveau réservé jusqu’alors aux seuls satellites. C’est pourtant cette même caméra qui sera remplacée à peine quelques années plus tard par une seconde version, en raison d’une innovation qui restera longtemps secrète. La société américaine Itek parvient en effet à mettre au point un prototype de capteur fondé sur la technologie SWIR.
Voir l’invisible
Peu connue du grand public, cette technologie exploite la longueur d’onde dite proche des infrarouges (SWIR signifie en effet Short Wave Infra Red – « ondes courtes infrarouge ») qui se situe entre 1 et 2,5 μm. En deçà, il s’agit du domaine du spectre baptisé NIR (Near Infra Red – « proche infrarouge ») utilisé par les intensificateurs de lumière et, au-delà de 3 μm, de celui des autodirecteurs de missiles (MWIR) ou de l’imagerie thermique sans illumination (LWIR). Or le SWIR offre plusieurs particularités notables.
Tout d’abord, contrairement à l’imagerie traditionnelle où l’on ne distingue que les points chauds, la résolution sur des distances bien supérieures est ici incomparable. En outre, l’observation sur cette longueur d’onde est moins altérée par la température ambiante et la condensation atmosphérique. Mais surtout, à 1,4 μm, l’eau cesse d’être transparente pour devenir opaque. Un atout qui permet ainsi de caractériser les matériaux secs et d’utiliser la surface des océans ou le fond du ciel rendu humide par l’évaporation naturelle comme un écran noir sur lequel les objets furtifs rendus indétectables pour les radars traditionnels, en raison de leurs tailles, de leurs volumes, de leurs matériaux absorbants, ou de leurs dispositifs en guerre électronique, apparaissent ici au grand jour.
Il devient donc possible à des distances de plus de 150 km de contrer les systèmes de camouflage, de détecter comme de procéder à la classification des avions furtifs, des drones, des missiles de croisière, ou des embarcations dédiées aux forces spéciales. Une capacité d’autant plus redoutable qu’elle est totalement passive, donc indétectable, et qui surtout ne prête pas le flanc aux dispositifs de guerre électronique. Enfin, cette technologie n’en serait, si l’on en croit les experts, qu’au début de son évolution. En effet, elle n’exploiterait pas encore le phénomène d’illumination naturel baptisé « Night Glow » qui se produit de nuit, à 80 km d’altitude, dans la haute atmosphère.
Un phénomène qui, une fois maîtrisé, constituera un véritable atout pour des plateformes volant au-dessus du plafond nuageux et en charge des missions de veille stratégique.
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