La dépendance de la France aux gros-porteurs ukrainiens et russes était déjà pointée du doigt avant la guerre : elle l'est davantage aujourd’hui.
Alors que le coq français a toujours refusé de confier ses ailes à l’aigle américain, la logistique aérienne stratégique française repose largement sur des compagnies aériennes cargo ukrainiennes et russes exploitant les Antonov 124 et Antonov 225. Ces avions d'un gabarit exceptionnel, sont les seuls capables de déplacer les charges les plus lourdes, et à permettre d'assurer une logistique de la Métropole vers les différents théâtres d'opération.
Ce choix, déjà largement critiqué avant la guerre pour la question évidente de souveraineté et la dépendance qu'il génère vis-à-vis d'entreprises privées, va devoir évoluer pour prendre en compte la nouvelle réalité géopolitique et matérielle, entre la destruction de certains appareils ukrainiens et l'interdiction de faire appel à des sociétés russes.
En Europe, l'aviation de transport stratégique française n'est pas la seule à avoir recours au privé pour compléter ses moyens. Aucun pays européen ne dispose d’une flotte de transport aérien comptant des avions d'une telle capacité. Faute de mieux, plusieurs options se sont offertes :
- Du côté de l’OTAN, il existe la solution internationale pour le transport aérien stratégique (SALIS), où cinq An-124 sont à disposition des pays parties au consortium dont la France. SALIS garantie l’accès à deux An-124 en 72 heures maximum, voire jusqu'à quatre avec un préavis de six jours et cinq avec un préavis de neuf jours.
- L’agence OTAN de soutien et d’acquisition (NSPA) a pour sa part signé en 2018 un contrat avec la société Antonov afin de mettre à disposition des pays membres certains autres gros-porteurs, comme le An-225, l’An-22 et l’IL-76.
- Autre option pour la France : celle des « bons de commande ». C’est ce qu’elle a pris l’habitude de faire avec des compagnies privées russes et ukrainiennes, via la société International Chartering Systems (ICS) jusqu’en 2017 (puis Avico ensuite). Donc, grâce au contrat mis en œuvre par l’entreprise, la France a pu avoir accès à des An-124, Il-76, An-225, B747, B777, B767, B737 ou An-12.
Alors que le mythique C-160 Transall tire sa révérence, la capacité perdue est largement compensée par la montée en puissance de l'A400M d'Airbus. Issu d’une coopération européenne intégrant la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni, le Portugal, la Belgique, le Luxembourg puis la Turquie, l'avion a vocation à remplacer les flottes vieillissantes de C-160 Transall (de Transport Allianz) et de C-130 Hercules (de Lockheed Martin). En complément, la France dispose de 15 ravitailleurs A330 MRTT pour compléter sa flotte de transport aérien stratégique comptant 35 A400M.
L'A400M a une longueur de 45 mètres et une hauteur de près de 15 mètres, ce qui offre un volume d'emport inégalé pour la flotte française. L'avion a une capacité d’emport de 35 tonnes maximale, contre 10 tonnes pour le C-160 Transall et 20 tonnes pour le C-130H-30 Hercules. Des capacités en réelle augmentation, mais qui restent limitées au regard des appareils américains (136 tonnes d'emport pour le C-5 Galaxy, 77 tonnes pour le C-17 Globemaster) ou de l’An-124 avec sa capacité de 150 tonnes de charge utile.
Un problème se pose alors pour le transport des plus gros équipements français, amenant le ministère des Armées à dédier sa prochaine étude prospective et stratégique à la question "Quelles solutions prospectives pour le transport aérien militaire stratégique à l’horizon 2030-2040 ?".
L'invasion de l'Ukraine par la Russie rebat les cartes. Les sanctions contre les entreprises russes interdisent désormais tout recours à la flotte de la compagnie Volga Dniepr comptant notamment 10 An-124 et 8 Il-76. L'assaut aéroporté russe sur l’aéroport de Hostomel, qui a eu lieu à la fin du mois de février, a pour sa part conduit à la destruction de tous les appareils de la société Antanov présent sur place, dont l'unique An-225. La compagnie Antonov Airlines ne disposerait plus que de trois An-124, et les capacités d'assurer leur maintenance sur le long terme malgré la destruction de ses infrastructures est inconnue...
Les capacités de déploiement des armées françaises sont dès lors largement amputées et des arbitrages devront être réalisés, probablement au profit des alternative anglo-saxones, en faisant appel aux C-17 et C-5 pourtant bien plus chers. De nombreux pays possèdent des C-17, comme le Qatar, l'Inde, la Grande-Bretagne, les Émirats ou le Koweït... mais aussi l'OTAN, qui en possède 3 au titre de la Strategic Airlift Capability de laquelle la France n'est pas partie prenante. La France, qui s'est toujours gardée de dépendre des moyens américains ou de l'OTAN pour ses besoins, va peut-être devoir réviser sa position en l'absence des Antonov...
À plus long terme, la solution pourrait être européenne, avec le projet Strategic Air Transport for Outsized Cargo (SATOC) adopté en novembre 2021 et qui devrait aboutir en 2026 au développement d'un programme européen d'appareil cargo. Une solution à plus long terme donc...
La dépendance de la France aux gros-porteurs ukrainiens et russes était déjà pointée du doigt avant la guerre : elle l'est davantage aujourd’hui.
Alors que le coq français a toujours refusé de confier ses ailes à l’aigle américain, la logistique aérienne stratégique française repose largement sur des compagnies aériennes cargo ukrainiennes et russes exploitant les Antonov 124 et Antonov 225. Ces avions d'un gabarit exceptionnel, sont les seuls capables de déplacer les charges les plus lourdes, et à permettre d'assurer une logistique de la Métropole vers les différents théâtres d'opération.
Ce choix, déjà largement critiqué avant la guerre pour la question évidente de souveraineté et la dépendance qu'il génère vis-à-vis d'entreprises privées, va devoir évoluer pour prendre en compte la nouvelle réalité géopolitique et matérielle, entre la destruction de certains appareils ukrainiens et l'interdiction de faire appel à des sociétés russes.
Bonjour. Qui peut croire au projet SATOC ? Le besoin européen, avec peu d'espoir d'exportation, serait de tout au plus quelques dizaines d'appareils. Un ... gouffre financier à venir, d'autant qu'il devra composer avec des spécificités différentes des éventuels pays participants, ceci n'est pas sans rappeler la genèse de l'A400M qui a amené en son temps Airbus au bord du précipice. La France sera sous la dépendance des américains jusqu'à ce que ces derniers développent un nouveau programme d'avion lourd pour remplacer les C5, voire les C17, et dont nous devrons nous porter client, restant de fait sous une relative dépendance. plus
En Europe, l'aviation de transport stratégique française n'est pas la seule à avoir recours au privé pour compléter ses moyens. Aucun pays européen ne dispose d’une flotte de transport aérien comptant des avions d'une telle capacité. Faute de mieux, plusieurs options se sont offertes :
- Du côté de l’OTAN, il existe la solution internationale pour le transport aérien stratégique (SALIS), où cinq An-124 sont à disposition des pays parties au consortium dont la France. SALIS garantie l’accès à deux An-124 en 72 heures maximum, voire jusqu'à quatre avec un préavis de six jours et cinq avec un préavis de neuf jours.
- L’agence OTAN de soutien et d’acquisition (NSPA) a pour sa part signé en 2018 un contrat avec la société Antonov afin de mettre à disposition des pays membres certains autres gros-porteurs, comme le An-225, l’An-22 et l’IL-76.
- Autre option pour la France : celle des « bons de commande ». C’est ce qu’elle a pris l’habitude de faire avec des compagnies privées russes et ukrainiennes, via la société International Chartering Systems (ICS) jusqu’en 2017 (puis Avico ensuite). Donc, grâce au contrat mis en œuvre par l’entreprise, la France a pu avoir accès à des An-124, Il-76, An-225, B747, B777, B767, B737 ou An-12.
Alors que le mythique C-160 Transall tire sa révérence, la capacité perdue est largement compensée par la montée en puissance de l'A400M d'Airbus. Issu d’une coopération européenne intégrant la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni, le Portugal, la Belgique, le Luxembourg puis la Turquie, l'avion a vocation à remplacer les flottes vieillissantes de C-160 Transall (de Transport Allianz) et de C-130 Hercules (de Lockheed Martin). En complément, la France dispose de 15 ravitailleurs A330 MRTT pour compléter sa flotte de transport aérien stratégique comptant 35 A400M.
L'A400M a une longueur de 45 mètres et une hauteur de près de 15 mètres, ce qui offre un volume d'emport inégalé pour la flotte française. L'avion a une capacité d’emport de 35 tonnes maximale, contre 10 tonnes pour le C-160 Transall et 20 tonnes pour le C-130H-30 Hercules. Des capacités en réelle augmentation, mais qui restent limitées au regard des appareils américains (136 tonnes d'emport pour le C-5 Galaxy, 77 tonnes pour le C-17 Globemaster) ou de l’An-124 avec sa capacité de 150 tonnes de charge utile.
Un problème se pose alors pour le transport des plus gros équipements français, amenant le ministère des Armées à dédier sa prochaine étude prospective et stratégique à la question "Quelles solutions prospectives pour le transport aérien militaire stratégique à l’horizon 2030-2040 ?".
L'invasion de l'Ukraine par la Russie rebat les cartes. Les sanctions contre les entreprises russes interdisent désormais tout recours à la flotte de la compagnie Volga Dniepr comptant notamment 10 An-124 et 8 Il-76. L'assaut aéroporté russe sur l’aéroport de Hostomel, qui a eu lieu à la fin du mois de février, a pour sa part conduit à la destruction de tous les appareils de la société Antanov présent sur place, dont l'unique An-225. La compagnie Antonov Airlines ne disposerait plus que de trois An-124, et les capacités d'assurer leur maintenance sur le long terme malgré la destruction de ses infrastructures est inconnue...
Les capacités de déploiement des armées françaises sont dès lors largement amputées et des arbitrages devront être réalisés, probablement au profit des alternative anglo-saxones, en faisant appel aux C-17 et C-5 pourtant bien plus chers. De nombreux pays possèdent des C-17, comme le Qatar, l'Inde, la Grande-Bretagne, les Émirats ou le Koweït... mais aussi l'OTAN, qui en possède 3 au titre de la Strategic Airlift Capability de laquelle la France n'est pas partie prenante. La France, qui s'est toujours gardée de dépendre des moyens américains ou de l'OTAN pour ses besoins, va peut-être devoir réviser sa position en l'absence des Antonov...
À plus long terme, la solution pourrait être européenne, avec le projet Strategic Air Transport for Outsized Cargo (SATOC) adopté en novembre 2021 et qui devrait aboutir en 2026 au développement d'un programme européen d'appareil cargo. Une solution à plus long terme donc...
Bonjour. Qui peut croire au projet SATOC ? Le besoin européen, avec peu d'espoir d'exportation, serait de tout au plus quelques dizaines d'appareils. Un ... gouffre financier à venir, d'autant qu'il devra composer avec des spécificités différentes des éventuels pays participants, ceci n'est pas sans rappeler la genèse de l'A400M qui a amené en son temps Airbus au bord du précipice. La France sera sous la dépendance des américains jusqu'à ce que ces derniers développent un nouveau programme d'avion lourd pour remplacer les C5, voire les C17, et dont nous devrons nous porter client, restant de fait sous une relative dépendance. plus
Bjr, Sauf, Révolution de Palais en Russie !! Inimaginable avant l'invasion, envisageable à moyen terme, au regard de la mauvaise tournure des évènements pour le ... dictateur Poutine, sa clique oligarques et de généraux, dont l'isolement et les sanctions internationales pourraient faire imploser le système. Une dictature, c'est comme un château de carte, il suffit d'une carte, la bonne à la base " le peuple", pour que l'édifice s'écroule très rapidement... Ce que j'espère vivement...!!! Wait and See... plus
(suite). Reste les solutions "civiles" qui ne peuvent être que des pis-allers. Le Beluga ST verra ses services tout prochainement offerts par Airbus. Il ... a prouvé qu'il pouvait transporter, sans démontage, un hélicoptère Caracal. Inconvenient, et non des moindres, il ne dispose pas de rampe de chargement. Autre option : un A380 fret. En son temps, Airbus avait commercialisé un A380F qui avait reçu une dizaine d'options de chacune des compagnies Fed EX et UPS. Airbus a abandonné le projet. Il pourrait sans doute revivre sur la base d'une conversion Fret des A380 qui sont retirés du marché et qui ont encore un fort potentiel. Inconvénients : cet appareil ne pourrait quasiment transporter que du fret "palettisable" et il ne dispose pas non plus d'une rampe de chargement. plus
Air et Cosmos deviendrait elle un marché pour Aviation NXT que préside Xavier Tytelman, par ailleurs rédacteur en chef de la version numérique d'A&C ... ? plus
Je suis démasqué, je fais du conseil dans Aviation NXT en plus d'écrire dans Air&Cosmos... scoop : j'ai aussi une chaine Youtube !
Selon la source "infolegale" (elle n'est pas la seule) , vous êtes monsieur Tytelman Président de Aviation NXT, et pas seulement "conseil". Cela n'est ... pas la même chose. plus
Oui Aviation NXT est une société de conseil, elle existait plus d'un an avant que je ne rejoigne Air&Cosmos
Re(suite). Votre décompte des A330 Mrtt et A400M en service dans l'armée de l'air française est inexact. Pour ce qui est des A330MRTT, six ... étaient en service fin 2021 auxquels il faut ajouter 3 A330-200 achetés d'occasion et qui n'ont pas encore été portés au standard MRTT. Pour ce qui est des A400M, le 18ème a été livré en mai 2021, la livraison du 25ème est prévue en 2025. On est donc loin des 15 + 35 que vous affichez. plus
jmarc G. Le décompte exprimé par le dernier interlocuteur est exact, Florence.Parly souhaitait accélérer les livraisons de A400m....nous verrons entre souhaits et réalité. Le projet SATOC pourrait ... être viable sous certaines conditions, le nombre de pays coopérants-Clients. L'expérience de l'A400M est tirée, les besoins de gros porteurs demeurent. En espérant que la guerre en Ukraine cimente d'avantage la coopération européenne en matière de défense. Bien amicalement. plus
@j Marc G. Êtes vous bien sûr que les leçons de l'A400M ont été tirées ? La règle du juste retour, ce fléau, est ... toujours là, même si sa présence est plus discrète et d'autant plus insidieuse. Bien cordialement. plus
Plus aucun avion n'est en production, c5, c17, antonov. Donc dans tous les cas le pb va se poser pour tout le monde ... d'ici quelques années plus
Effectivement, les équipes Airbus ont tiré les Leçons de l'A400M, maintenant les exigences, ou caprices, en provenances des ministères sont plus difficiles à mettre en concordance ... avec les équipes industrielles. IL n'y a, pratiquement plus d'ingénieurs au sein des ministères, les postes sont occupés par des technos venus des mêmes écoles. plus
Y aurait-il un conflit d'intérêt entre Aviation NXT et A&C ?
@Xavier Tytelman. Je m'en tiens là. Vous avez très bien compris où je voulais en venir. Je vous apprécie par ailleurs.
Même s'il est exclusif à Airbus Industrie, il existe aussi l'A330-743L (Beluga XL), qui possède une charge utile maximum de 53 tonnes. Ce ne sont ... pas les A330 qui manqueraient pour passer par cette mutation extrême. plus
C’est incompréhensible !!! Airbus vient de mettre en service les nouveau Bélouga géant pour le transport très lourd ( transport des parties de la ... fusée Ariane. J’ai lu un article dernièrement où il était même ouvert à louer aux armées ??? Qu’est-ce que toutes ces possibilités outre le Bélouga géant, veulent dire ? C’est insensé !!! Ou alors, comme toujours quelque chose qu’on veut pas nous dire… plus
J'indique concernant le transport de satellites que c'est un C-5C Galaxy qui va s'occuper du transport du ''Surface Water Ocean Topography'' de la France ... a la base de Vandenberg. plus
@Jean François. Les Beluga ne disposent pas de rampe de chargement / déchargement, ce qui est un sacré handicap
Bonjour. Qui peut croire au projet SATOC ? Le besoin européen, avec peu d'espoir d'exportation, serait de tout au plus quelques dizaines d'appareils. Un ... gouffre financier à venir, d'autant qu'il devra composer avec des spécificités différentes des éventuels pays participants, ceci n'est pas sans rappeler la genèse de l'A400M qui a amené en son temps Airbus au bord du précipice. La France sera sous la dépendance des américains jusqu'à ce que ces derniers développent un nouveau programme d'avion lourd pour remplacer les C5, voire les C17, et dont nous devrons nous porter client, restant de fait sous une relative dépendance. plus