La Russie déploie un grand nombre d'avions afin d’acheminer troupes et matériels vers le Kazakhstan. L'occasion d'analyser le niveau des moyens logistiques russes et des équipements déployés.
La logistique aérienne : point noir de l'armée de l'air russe en Syrie
Les difficultés logistiques rencontrées par la Russie lors de son déploiement en Syrie ont été nombreuses. Ses An-124 furent utilisés pour les unités à plus haute valeur (comme les systèmes sol-air S-400 ou les chars de combat), une partie de la flotte clouée au sol ayant réduit les capacités du pays. C'est donc la Marine russe qui a donc pris le relai, assurant 55% du transport entre la Russie et la Syrie grâce à la mise en œuvre de toutes les unités disponibles, jusqu'à rediriger un brise-glace vers la Méditerranée... Les déploiements de troupes russes hors du territoire national sont donc scrutés à la loupe afin de pouvoir détecter les signes d'un renouveau, ou au contraire d'un enfoncement dans la crise. Le retour d'expérience du déploiement massif et rapide d'hommes et de matériels au Kazakhstan est à ce titre révélateur.
Une large panoplie d'appareils déployés
Les images diffusées dans les médias montrent la présence des avions-géants quadriréacters, comme l'Iliouchine Il-76MD (d'une masse maximale de 210 tonnes au décollage dont 52 de fret) ou l'Antonov-124 Condor (jusqu'à 390 tonnes dont 150 de fret). D'après les déclarations du Ministère de la défense russe, douze Il-76 et un An-124-100 avaient déjà été mis en œuvre le vendredi 7 janvier, avec une possibilité de faire appel à une flotte totale de 70 Il-76 et cinq An-124 pour assurer un pont aérien depuis les aéroports de Moscou Chkalovsk, Severny à Ivanov et Vostochny à Ulyanovsk vers celui d'Almaty au Kazakhstan.
D'après les images partagées par la chaîne télévisée Russia Today le 8 janvier, pas moins de 15 Il-76 et peuvent être dénombrés en même temps sur le tarmac de l'aéroport d'Almaty, un nombre confirmé par une photo-satellite récente partagée sur Google Earth.
La situation semble donc rassurante du point de vue russe, et une remontée en force serait en œuvre, d'autant que l'Il-76MD-90A, de 210 tonnes au décollage pour une capacité portée à 52 tonnes de fret, rentre pour sa part progressivement dans le parc de l'Armée russe, même n'a pas été identifié dans cette opération.
D'importants moyens déployés
L'Organisation du traité de sécurité collective (accord de défense mutuel entre certains Etats de l'ex-URSS) ayant été activé par le Kazakhstan, les forces russes peuvent également compter sur le renfort de troupes originaires d'Arménie ou de Biélorussie. Une nouvelle version de l'accord, signée le 22 décembre 2021, rappelle justement l'engagement mutuel de sécurité et renforce la formation des militaires kazakhs par la Russie et le partage d'informations confidentielles.
Parmi les moyens déployés, on dénombre un nombre approximatif de 5000 hommes dont des spetsnaz et des troupes du GRU, ainsi qu'un nombre important de blindés. On peut en particulier identifier des véhicule Leer-3 associés au petit drone catapulté Orlan-10 dont la charge utile de 6 kg doit notamment permettre d'intercepter les communications des téléphones portables, d'en identifier la source, mais aussi de brouiller toutes communications dans une zone. Un moyen plus précis et localisé que la coupure totale d'internet vécue par le pays le 5 janvier...
Outre les transports de troupes dont le BTR-80 ou le Tigr-M SpN (équivalent au Humvee américain), la large panoplie de blindés déployés comprend un nombre étonnant de moyens offensifs pour une opération de maintien de la paix, comme les véhicule Arbalet DM dont la tourelles de 12.7mm est capable d'être contrôlée de manière téléopérée, ou le BMD-2 de combat d'infanterie (image ci-contre). Des moyens qui ont certainement permis de reprendre l'aéroport d’Almaty, un temps tombé aux mains des rebelles mais désormais sécurisé par la Russie.
Face aux craintes de non-respect des droits de l'Homme exprimés par le gouvernement américain (les forces de l'ordre ayant reçu l'autorisation de tirer sans sommation), le président Poutine a répété qu'un scénario "à l'Ukrainienne" avec une révolution colorée ne serait pas accepté au Kazakhstan. Le cosmodrome de Baïkonour, vital pour la Russie, doit logiquement rester entre les mains d'un régime allié, contrairement au sort du port russe de Sébastopol, situé en Crimée ukrainienne jusqu'à son annexion par Moscou. Des troupes russes ont d'ailleurs été déployées sur le cosmodrome, signe du caractère vital de l'infrastructure.
Le Kazakhstan et la Russie répètent également que des terroristes étrangers ayant reçu un entrainement paramilitaire ont contribué à la déstabilisation du pays, dont des membres de l'Etat islamique et du prédicateur turc Fethullah Gülen. Des militants présentés comme faisant partie du groupement ultranationalistes et islamistes des loups-gris auraient également été interpellés. Ce groupe militant panturc est classé sur la liste des organisations terroriste dans plusieurs pays, dont le Kazaksthan, la Russie, les Etats-Unis, l'Autriche ou la France.