Le 12 janvier 2022, le gouvernement turc a approuvé le lancement de la première phase de production du Hürjet. Cet appareil monoréacteur d'entrainement appartient à la catégorie des LCA (Light Combat Aircraft, ou avion de chasse léger) et est le premier avion de ce type produit par l’industrie aéronautique turque. Par l’intermédiaire de ce programme lancé en 2017, Turkish Aerospace semble donner à la Turquie les moyens de ses ambitions d’indépendance matérielle. Cette idée d’indépendance transparait même dans le nom donné à l’appareil : « Hür » signifiant « libre » en turc…
Le Hürjet est un appareil initialement conçu pour remplacer les appareils d’entraînement actuellement en dotation dans la force aérienne turque. Ces avions biréacteurs utilisés pour la transition vers le F-16, que sont les Northrop T-38 Talon et Canadair NF-5A/B Freedom Fighter, sont certes robustes mais vieillissants. Leur âge avancé implique qu’ils ne seront bientôt plus à même d’assurer leurs missions de formation vers des appareils toujours plus avancés technologiquement, et cela malgré les retrofits opérés sur les T-38.
Le Hürjet se différencie de ses prédécesseurs encore en service dans les forces turques par son architecture monoréacteur et sa configuration en aile haute en flèche avec échines. Ainsi, il se positionne sur une conception analogue à certains de ses concurrents et contemporains tels que le KAI T-50 Golden Eagle ou le Boeing T-7A Red Hawk.
Le Mach maximum du Hürjet est de 1.4 et l’appareil est capable d’endurer des facteurs de charge proches des avions de chasse en service dans les forces. Ses performances, couplées à son avionique avancée permettant de simuler différentes situations opérationnelles (largages de bombes, tirs missiles, passes canon…) font de lui un avion d’entraînement avancé.
Son taux de montée de 39 000 fpm en fait un appareil pouvant assurer des missions de police aérienne mais aussi un avion de voltige. Il est suggéré que cet appareil sera en dotation dans la patrouille acrobatique représentant la force aérienne turque : les Turkish Stars. Enfin, le Hürjet pourra endosser des missions de close air support (CAS), avec une capacité de presque trois tonnes d’emports. Sa polyvalence le positionne très clairement sur le segment des LCA, déjà occupé par de nombreux appareils conçus par différents pays.
Une capacité intéressante qui est à l’étude chez TAI est la navalisation du Hürjet. L’appareil pourrait être capable de décoller et apponter sur le TCG Anadolu, le LHD (Landing Helicopter Dock) d'origine espagnole mais assemblé en Turquie. Le navire possède un tremplin permettant l’usage d’appareils décollant d’un pont d’envol à la seule force de leurs turboréacteurs (image ci-contre).
Cependant, le LHD ne possède pas de brins d’arrêts permettant le freinage sur courte distance lors d’un appontage. Cette limitation technique impose l’usage d’une voilure permettant de tenir des vitesses d’approches bien plus faibles que les appareils de sa catégorie (appareils type LCA Tejas) et nécessite une très bonne manoeuvrabilité à de grandes incidences. Si TAI réussit ce tour de force, le Hürjet pourrait se singulariser de la concurrence sur le marché des LCA…
L’ambition de Turkish Aerospace avec le Hürjet est claire : fournir à la Turquie les moyens de son indépendance des États-Unis, et par extension de l’OTAN, afin de pallier les éventuelles sanctions la privant de matériel neuf. Ce besoin d’indépendance fait notamment suite aux nombreuses tensions qui se sont intensifiées lors de l’achat annoncé en 2019 par Ankara de batteries de missiles russes S-400 Triumph. Cet achat ayant eu pour effet, à l’époque, de bouter la Turquie hors du programme F-35 alors qu’elle était un partenaire de niveau 3 de Lockheed Martin, mais aussi de lui interdire toute modernisation de ses F-16, ou même de bénéficier de partenariats industriels dans le développement de programmes nationaux…
En plus de constituer une réponse au vieillissement de la flotte actuelle des forces turques et aux problématiques de renouvellement de celle-ci par des achats auprès des États-Unis, le Hürjet permettrait à la Turquie de se positionner comme une nouvelle puissance économique régionale basée sur la défense. En effet, TAI et son directeur le Dr. Temel Kotil croient à l’exportation de leur appareil, notamment pour répondre à l’appel d’offres de la Malaise concernant l’achat d’avions de combat légers.
Mais la question qu’il est légitime de poser est : L’industrie aéronautique turque a-t-elle les moyens de ses ambitions avec le Hürjet ? La réponse n’est pas catégorique et repose grandement sur des variables qui nous sont inconnues ou qui sont sujettes à des évolutions rapides. Cependant, on peut esquisser un début d’analyse.
La Turquie possède une filière défense en pleine montée en puissance, en se basant sur la maîtrise de l’industrialisation d’un projet d’avion de combat permise par la production sous licence de F-16C au début des années 1990. Leur maîtrise des process leur permit dans ce cadre de fabriquer jusqu’à 70 % de l’aérostructure in-situ. TAI a également déjà eu l'occasion de s'essayer à la vente d’avions de chasse ou de leur modernisation, avec des contrats au profit de l’Égypte, du Pakistan ou de la Jordanie.
La Turquie maîtrise ainsi de la conception de pièces d’aérostructures et d’appareils complets, jusqu'à fournir quelques ensembles de l'appareil de transport Airbus A400M, et est devenu un acteur prépondérant dans la production des drones, notamment avec la société Baykar conceptrice du TB2.
Cependant, on peut opposer à ces compétences industrielles et de conception aéronautique un principal problème : la Turquie ne possède pas encore de filière de conception de motorisation aéronautique. Ce défaut lui interdit de facto la production d’un aéronef totalement indépendant. Dans le cadre du programme Hürjet, deux options sont envisageables : l’achat de moteurs américains (General Electrics F404-GE-102) ou européens (Eurojet EJ200). La fiche technique actuelle du Hürjet semble indiquer que le moteur choisi serait le F404, du fait de la poussée annoncée de 79 kN. En voulant son indépendance, la Turquie restera tout de même tributaire des États-Unis dans la conception de son avion indigène… Ce problème affecte aussi leur programme d’avion de 5e génération : le TF-X.
La question de l’indépendance vis-à-vis de l’avionique du Hürjet peut aussi être posée, même si TAI possède une capacité en la matière (retrofit avionique des T-38 et C-130 turcs). Il n’est pas impossible que celle-ci soit d’origine israélienne, du fait des compétences d’Israel Aerospace Industries en la matière. Souvenons-nous de la modernisation des F-4E Phantom II turcs qui fut opérée par IAI.
Le premier fuselage du Hürjet est en cours d’assemblage dans les usines de TAI, pour un roll-out et des premiers essais au sol prévus pour fin 2022. Le premier vol, quant à lui, est prévu le 18 mars 2023 pour commémorer le 108ème anniversaire du début de la bataille des Dardanelles de laquelle l’Empire Ottoman sortit victorieux. Le président de TAI annonce déjà une cadence de production élevée dès 2025 : deux appareils par mois. En tout cas, ces problématiques d’indépendance de fourniture de sous-systèmes ne semblent pas affecter la confiance de TAI en son nouvel appareil ambitieux.
Le 12 janvier 2022, le gouvernement turc a approuvé le lancement de la première phase de production du Hürjet. Cet appareil monoréacteur d'entrainement appartient à la catégorie des LCA (Light Combat Aircraft, ou avion de chasse léger) et est le premier avion de ce type produit par l’industrie aéronautique turque. Par l’intermédiaire de ce programme lancé en 2017, Turkish Aerospace semble donner à la Turquie les moyens de ses ambitions d’indépendance matérielle. Cette idée d’indépendance transparait même dans le nom donné à l’appareil : « Hür » signifiant « libre » en turc…
Le Hürjet est un appareil initialement conçu pour remplacer les appareils d’entraînement actuellement en dotation dans la force aérienne turque. Ces avions biréacteurs utilisés pour la transition vers le F-16, que sont les Northrop T-38 Talon et Canadair NF-5A/B Freedom Fighter, sont certes robustes mais vieillissants. Leur âge avancé implique qu’ils ne seront bientôt plus à même d’assurer leurs missions de formation vers des appareils toujours plus avancés technologiquement, et cela malgré les retrofits opérés sur les T-38.
Le Hürjet se différencie de ses prédécesseurs encore en service dans les forces turques par son architecture monoréacteur et sa configuration en aile haute en flèche avec échines. Ainsi, il se positionne sur une conception analogue à certains de ses concurrents et contemporains tels que le KAI T-50 Golden Eagle ou le Boeing T-7A Red Hawk.
Les moyens mise en œuvre pour la fabrication et commercialisation du Hurjet sont importants et s'il vol en 2023 ce pourrait être un succès ... commercial au même titre que le TB2 ... plus
Le Mach maximum du Hürjet est de 1.4 et l’appareil est capable d’endurer des facteurs de charge proches des avions de chasse en service dans les forces. Ses performances, couplées à son avionique avancée permettant de simuler différentes situations opérationnelles (largages de bombes, tirs missiles, passes canon…) font de lui un avion d’entraînement avancé.
Son taux de montée de 39 000 fpm en fait un appareil pouvant assurer des missions de police aérienne mais aussi un avion de voltige. Il est suggéré que cet appareil sera en dotation dans la patrouille acrobatique représentant la force aérienne turque : les Turkish Stars. Enfin, le Hürjet pourra endosser des missions de close air support (CAS), avec une capacité de presque trois tonnes d’emports. Sa polyvalence le positionne très clairement sur le segment des LCA, déjà occupé par de nombreux appareils conçus par différents pays.
Une capacité intéressante qui est à l’étude chez TAI est la navalisation du Hürjet. L’appareil pourrait être capable de décoller et apponter sur le TCG Anadolu, le LHD (Landing Helicopter Dock) d'origine espagnole mais assemblé en Turquie. Le navire possède un tremplin permettant l’usage d’appareils décollant d’un pont d’envol à la seule force de leurs turboréacteurs (image ci-contre).
Cependant, le LHD ne possède pas de brins d’arrêts permettant le freinage sur courte distance lors d’un appontage. Cette limitation technique impose l’usage d’une voilure permettant de tenir des vitesses d’approches bien plus faibles que les appareils de sa catégorie (appareils type LCA Tejas) et nécessite une très bonne manoeuvrabilité à de grandes incidences. Si TAI réussit ce tour de force, le Hürjet pourrait se singulariser de la concurrence sur le marché des LCA…
L’ambition de Turkish Aerospace avec le Hürjet est claire : fournir à la Turquie les moyens de son indépendance des États-Unis, et par extension de l’OTAN, afin de pallier les éventuelles sanctions la privant de matériel neuf. Ce besoin d’indépendance fait notamment suite aux nombreuses tensions qui se sont intensifiées lors de l’achat annoncé en 2019 par Ankara de batteries de missiles russes S-400 Triumph. Cet achat ayant eu pour effet, à l’époque, de bouter la Turquie hors du programme F-35 alors qu’elle était un partenaire de niveau 3 de Lockheed Martin, mais aussi de lui interdire toute modernisation de ses F-16, ou même de bénéficier de partenariats industriels dans le développement de programmes nationaux…
En plus de constituer une réponse au vieillissement de la flotte actuelle des forces turques et aux problématiques de renouvellement de celle-ci par des achats auprès des États-Unis, le Hürjet permettrait à la Turquie de se positionner comme une nouvelle puissance économique régionale basée sur la défense. En effet, TAI et son directeur le Dr. Temel Kotil croient à l’exportation de leur appareil, notamment pour répondre à l’appel d’offres de la Malaise concernant l’achat d’avions de combat légers.
Mais la question qu’il est légitime de poser est : L’industrie aéronautique turque a-t-elle les moyens de ses ambitions avec le Hürjet ? La réponse n’est pas catégorique et repose grandement sur des variables qui nous sont inconnues ou qui sont sujettes à des évolutions rapides. Cependant, on peut esquisser un début d’analyse.
La Turquie possède une filière défense en pleine montée en puissance, en se basant sur la maîtrise de l’industrialisation d’un projet d’avion de combat permise par la production sous licence de F-16C au début des années 1990. Leur maîtrise des process leur permit dans ce cadre de fabriquer jusqu’à 70 % de l’aérostructure in-situ. TAI a également déjà eu l'occasion de s'essayer à la vente d’avions de chasse ou de leur modernisation, avec des contrats au profit de l’Égypte, du Pakistan ou de la Jordanie.
La Turquie maîtrise ainsi de la conception de pièces d’aérostructures et d’appareils complets, jusqu'à fournir quelques ensembles de l'appareil de transport Airbus A400M, et est devenu un acteur prépondérant dans la production des drones, notamment avec la société Baykar conceptrice du TB2.
Cependant, on peut opposer à ces compétences industrielles et de conception aéronautique un principal problème : la Turquie ne possède pas encore de filière de conception de motorisation aéronautique. Ce défaut lui interdit de facto la production d’un aéronef totalement indépendant. Dans le cadre du programme Hürjet, deux options sont envisageables : l’achat de moteurs américains (General Electrics F404-GE-102) ou européens (Eurojet EJ200). La fiche technique actuelle du Hürjet semble indiquer que le moteur choisi serait le F404, du fait de la poussée annoncée de 79 kN. En voulant son indépendance, la Turquie restera tout de même tributaire des États-Unis dans la conception de son avion indigène… Ce problème affecte aussi leur programme d’avion de 5e génération : le TF-X.
La question de l’indépendance vis-à-vis de l’avionique du Hürjet peut aussi être posée, même si TAI possède une capacité en la matière (retrofit avionique des T-38 et C-130 turcs). Il n’est pas impossible que celle-ci soit d’origine israélienne, du fait des compétences d’Israel Aerospace Industries en la matière. Souvenons-nous de la modernisation des F-4E Phantom II turcs qui fut opérée par IAI.
Le premier fuselage du Hürjet est en cours d’assemblage dans les usines de TAI, pour un roll-out et des premiers essais au sol prévus pour fin 2022. Le premier vol, quant à lui, est prévu le 18 mars 2023 pour commémorer le 108ème anniversaire du début de la bataille des Dardanelles de laquelle l’Empire Ottoman sortit victorieux. Le président de TAI annonce déjà une cadence de production élevée dès 2025 : deux appareils par mois. En tout cas, ces problématiques d’indépendance de fourniture de sous-systèmes ne semblent pas affecter la confiance de TAI en son nouvel appareil ambitieux.
Les moyens mise en œuvre pour la fabrication et commercialisation du Hurjet sont importants et s'il vol en 2023 ce pourrait être un succès ... commercial au même titre que le TB2 ... plus
Le Hurjet est la preuve flagrante d'une montée en compétence très rapide de la Turquie en matière aéronautique. Le refus par les Usa d'honorer ... le contrat de fourniture des F35 ne fera qu'accelerer le mouvement. La difficulté majeure reste les moteurs. Mais nul doute que les turcs trouveront une solution avec probablement une aide extérieure. plus
Les moyens mise en œuvre pour la fabrication et commercialisation du Hurjet sont importants et s'il vol en 2023 ce pourrait être un succès ... commercial au même titre que le TB2 ... plus