Un Su-34 russe largue une bombe au-dessus de Belgorod
Un Su-34 russe largue une bombe au-dessus de Belgorod
© Mil.ru

publié le 21 avril 2023 à 02:20

738 mots

Un Su-34 russe largue une bombe au-dessus de Belgorod

Le 20 avril, la ville de Belgorod en Russie a été secouée par une explosion. Il s’agit d’une munition larguée, d’après le ministère de la Défense russe, en "urgence" par un bombardier tactique Su-34 des Forces aérospatiales russes. La munition en question, pas encore identifiée, a blessé deux personnes, créé un trou de 20 mètres de diamètre dans l’une des artères routières de la ville et provoqué d’autres dégâts matériels. Le caractère de l'urgence, invoqué par les officiels russes, est toutefois discutable.


Une bombe sur Belgorod

Le jeudi 20 avril vers 22h03 locale (23h à Paris), une forte explosion a été entendue dans la ville de Belgorod (oblast de Belgorod, Russie). Celle-ci a été provoquée par le largage d'une munition par un avion de combat russe, comme le précise le Ministère de la Défense russe auprès de Tass ;

"Vers 22h15, heure de Moscou, le 20 avril, alors qu'un avion Su-34 des Forces aérospatiales russes effectuait un vol au-dessus de la ville de Belgorod, un largage d'urgence d'une munition aérienne s'est produit."

La munition en question n'est pas encore identifiée. Celle-ci est tombée sur un boulevard (coordonnées GPS 50.56821236418548, 36.584596133763256), créant un trou de 20 mètres de diamètre. Le gouverneur de la région de Belgorod précise sur sa chaine Telegram que deux personnes ont été blessées : une femme légèrement blessée et une seconde souffrant de blessures moyennes, nécessitant un transport vers une structure hospitalière. En termes de dégât matériels, 4 voitures ont été endommagées [probablement très sérieusement voire détruite] et 4 appartements d'un immeuble proche ont subi divers dégâts.

Un peu d'OSINT : la configuration de l'intersection routière, du parc et des immeubles avoisinant permet de géolocaliser le lieu d'impact aux environs des coordonnées GPS 50.56821236418548, 36.584596133763256.
Un peu d'OSINT : la configuration de l'intersection routière, du parc et des immeubles avoisinant permet de géolocaliser le lieu d'impact aux environs des coordonnées GPS 50.56821236418548, 36.584596133763256. © Air&Cosmos, Google Earth, @bayraktar_1love
Un peu d'OSINT : la configuration de l'intersection routière, du parc et des immeubles avoisinant permet de géolocaliser le lieu d'impact aux environs des coordonnées GPS 50.56821236418548, 36.584596133763256.

Largage en urgence ?

Si les vidéos démontrent clairement qu'un projectile, probablement une bombe air-sol de "faible" puissance, a provoqué l’explosion (voir la vidéo dans le tweet ci-dessus), la cause primaire de cet incident semble toutefois plus discutable.

Au sein de toutes les forces aériennes dans le monde, le largage de munitions en urgence requiert une procédure stricte ; il ne s’agirait pas de larguer une bombe, roquette ou un missile sur une zone densément peuplée, sur un entrepôt de munitions ou sur un centre de décision (poste de commandement, Kremlin, etc). Au contraire, il vaut mieux viser des étendues naturelles, très peu voire pas du tout peuplée afin de limiter les dommages au sol.

Par ailleurs, quelle urgence demandait à l'équipage de l'avion russe de larguer une munition active au-dessus d'une ville de presque 400.000 habitants ? Si l'avion a effectué un raid sur l'Ukraine, il aurait eu tout le temps de larguer sa cargaison sur l'Ukraine. Si cet avion a été endommagé, l'équipage aurait plus que probablement eu le temps de pouvoir larguer la bombe bien avant d'arriver au-dessus de la ville de Belgorod. Cette unique munition larguée pose aussi question : grâce à ses 12 points d'emport, le Su-34 peut transporter près de 8 tonnes de munitions air-sol (pods roquettes, missiles antiradars, missiles antichars, bombes de différente puissance,...). Où sont les autres munitions ?

Enfin, il ne faut pas refermer l'hypothèse de l'erreur humaine : l'équipage a peut-être largué la munition sans le vouloir ou la munition avait peut-être été mal fixée au sol et serait ainsi tombée par hasard sur Belgorod.

Su-34

Il s’agit d’un Su-27 repensé pour les frappes à longue distance ou en tant que bombardier tactique (alors dénommé Su-27IB). Le premier prototype, dénommé T-10V-1, décolle le 13 avril 1990 mais il faut attendre 1994 pour voir apparaitre la désignation finale de cet appareil, à savoir Su-34 (code OTAN : Fullback). Les premiers appareils rentrent en service en octobre 2006 malgré leur utilisation indirecte en Tchétchénie (brouillage radar en 2000 et 2002) et l’utilisation de deux prototypes en Géorgie en 2008. Le Su-34M, version modernisée, entre en service en 2021. Il emporte un meilleur radar d’attaque et la possibilité d’emport de munitions plus modernes.

Comme décrit précédemment, cet avion dispose de 12 points d’emports externes permettant le transport de 8 tonnes de pods, munitions et autres systèmes. Trois points d’emport sont situés sous chaque aile, un sous chaque réacteur et deux entre les réacteurs. Comprend également un point d’emport au bout de chaque aile pour l’emport d’un missile air-air courte portée R-73 (AA-12 Archer) ou un pods de systèmes de contre-mesures électroniques Khibiny. L’avion emport également un canon GSh-30-1 de 30 mm. En plus des missions de bombardement, il peut aussi effectuer des missions de reconnaissance grâce au système de reconnaissance sur pod BKR-3.

En 2022, les Forces aérospatiales comprenaient approximativement 105 Su-34 et 7 Su-34M. Au 21 avril 2023, 19 Su-34 et 1 Su-34M ont été détruit en Ukraine, soit 18% de pertes confirmées pour la flotte de Su-34 russes.

Article modifié le 21 avril 2023 à 03h10.

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21/04/2023 02:20
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Un Su-34 russe largue une bombe au-dessus de Belgorod

Le 20 avril, la ville de Belgorod en Russie a été secouée par une explosion. Il s’agit d’une munition larguée, d’après le ministère de la Défense russe, en "urgence" par un bombardier tactique Su-34 des Forces aérospatiales russes. La munition en question, pas encore identifiée, a blessé deux personnes, créé un trou de 20 mètres de diamètre dans l’une des artères routières de la ville et provoqué d’autres dégâts matériels. Le caractère de l'urgence, invoqué par les officiels russes, est toutefois discutable.

Un Su-34 russe largue une bombe au-dessus de Belgorod
Un Su-34 russe largue une bombe au-dessus de Belgorod

Une bombe sur Belgorod

Le jeudi 20 avril vers 22h03 locale (23h à Paris), une forte explosion a été entendue dans la ville de Belgorod (oblast de Belgorod, Russie). Celle-ci a été provoquée par le largage d'une munition par un avion de combat russe, comme le précise le Ministère de la Défense russe auprès de Tass ;

"Vers 22h15, heure de Moscou, le 20 avril, alors qu'un avion Su-34 des Forces aérospatiales russes effectuait un vol au-dessus de la ville de Belgorod, un largage d'urgence d'une munition aérienne s'est produit."

La munition en question n'est pas encore identifiée. Celle-ci est tombée sur un boulevard (coordonnées GPS 50.56821236418548, 36.584596133763256), créant un trou de 20 mètres de diamètre. Le gouverneur de la région de Belgorod précise sur sa chaine Telegram que deux personnes ont été blessées : une femme légèrement blessée et une seconde souffrant de blessures moyennes, nécessitant un transport vers une structure hospitalière. En termes de dégât matériels, 4 voitures ont été endommagées [probablement très sérieusement voire détruite] et 4 appartements d'un immeuble proche ont subi divers dégâts.

Un peu d'OSINT : la configuration de l'intersection routière, du parc et des immeubles avoisinant permet de géolocaliser le lieu d'impact aux environs des coordonnées GPS 50.56821236418548, 36.584596133763256.
Un peu d'OSINT : la configuration de l'intersection routière, du parc et des immeubles avoisinant permet de géolocaliser le lieu d'impact aux environs des coordonnées GPS 50.56821236418548, 36.584596133763256. © Air&Cosmos, Google Earth, @bayraktar_1love
Un peu d'OSINT : la configuration de l'intersection routière, du parc et des immeubles avoisinant permet de géolocaliser le lieu d'impact aux environs des coordonnées GPS 50.56821236418548, 36.584596133763256.

Largage en urgence ?

Si les vidéos démontrent clairement qu'un projectile, probablement une bombe air-sol de "faible" puissance, a provoqué l’explosion (voir la vidéo dans le tweet ci-dessus), la cause primaire de cet incident semble toutefois plus discutable.

Au sein de toutes les forces aériennes dans le monde, le largage de munitions en urgence requiert une procédure stricte ; il ne s’agirait pas de larguer une bombe, roquette ou un missile sur une zone densément peuplée, sur un entrepôt de munitions ou sur un centre de décision (poste de commandement, Kremlin, etc). Au contraire, il vaut mieux viser des étendues naturelles, très peu voire pas du tout peuplée afin de limiter les dommages au sol.

Par ailleurs, quelle urgence demandait à l'équipage de l'avion russe de larguer une munition active au-dessus d'une ville de presque 400.000 habitants ? Si l'avion a effectué un raid sur l'Ukraine, il aurait eu tout le temps de larguer sa cargaison sur l'Ukraine. Si cet avion a été endommagé, l'équipage aurait plus que probablement eu le temps de pouvoir larguer la bombe bien avant d'arriver au-dessus de la ville de Belgorod. Cette unique munition larguée pose aussi question : grâce à ses 12 points d'emport, le Su-34 peut transporter près de 8 tonnes de munitions air-sol (pods roquettes, missiles antiradars, missiles antichars, bombes de différente puissance,...). Où sont les autres munitions ?

Enfin, il ne faut pas refermer l'hypothèse de l'erreur humaine : l'équipage a peut-être largué la munition sans le vouloir ou la munition avait peut-être été mal fixée au sol et serait ainsi tombée par hasard sur Belgorod.

Su-34

Il s’agit d’un Su-27 repensé pour les frappes à longue distance ou en tant que bombardier tactique (alors dénommé Su-27IB). Le premier prototype, dénommé T-10V-1, décolle le 13 avril 1990 mais il faut attendre 1994 pour voir apparaitre la désignation finale de cet appareil, à savoir Su-34 (code OTAN : Fullback). Les premiers appareils rentrent en service en octobre 2006 malgré leur utilisation indirecte en Tchétchénie (brouillage radar en 2000 et 2002) et l’utilisation de deux prototypes en Géorgie en 2008. Le Su-34M, version modernisée, entre en service en 2021. Il emporte un meilleur radar d’attaque et la possibilité d’emport de munitions plus modernes.

Comme décrit précédemment, cet avion dispose de 12 points d’emports externes permettant le transport de 8 tonnes de pods, munitions et autres systèmes. Trois points d’emport sont situés sous chaque aile, un sous chaque réacteur et deux entre les réacteurs. Comprend également un point d’emport au bout de chaque aile pour l’emport d’un missile air-air courte portée R-73 (AA-12 Archer) ou un pods de systèmes de contre-mesures électroniques Khibiny. L’avion emport également un canon GSh-30-1 de 30 mm. En plus des missions de bombardement, il peut aussi effectuer des missions de reconnaissance grâce au système de reconnaissance sur pod BKR-3.

En 2022, les Forces aérospatiales comprenaient approximativement 105 Su-34 et 7 Su-34M. Au 21 avril 2023, 19 Su-34 et 1 Su-34M ont été détruit en Ukraine, soit 18% de pertes confirmées pour la flotte de Su-34 russes.

Article modifié le 21 avril 2023 à 03h10.



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