L'US Navy monte en puissance avec la mise en service de ses premiers Osprey
L'US Navy monte en puissance avec la mise en service de ses premiers Osprey
© US Navy

publié le 23 février 2022 à 08:30

1255 mots

L'US Navy monte en puissance avec la mise en service de ses premiers Osprey

Annoncé en 2017, le CMV-22B Osprey est en train de remplacer les premiers C-2A Greyhound de la Marine américaine. Ce remplacement a justement franchit une étape importante le 17 février 2022. En effet, le CMV-22B a reçu son Initial Operating Capability.


Le concept de Carrier Onboard Delivery (COD)

Le concept apparait au début de la Seconde Guerre mondiale, au sein de l'US Navy ; ses navires doivent s'éloigner des bases logistiques alliées sans avoir la possibilité de se ravitailler en hommes et matériels. Les hydravions sont ainsi utilisés pour relier les flottilles aux différents ports. Leur grand rayon d'action leur permet de couvrir une très grande distance mais ils ne peuvent apponter sur le porte-avions et encore moins s'y amarrer (à cause des ailes, pas du tout prévues dans cette optique), obligeant les navires à s'arrêter au risque de se faire attaquer.

A la fin de la guerre, l'US Navy décide alors de modifier des bombardiers-torpilleurs TBF-Avenger en avion cargo ; le TBM-3R devient le premier COD de la Marine. La tourelle est enlevée, la soute à munition devient une soute cargo et une porte sur la droite de l'appareil est ajoutée. L'avion peut ainsi transporter 500 kg de matériel ou 6 passagers en plus du pilote. Le transport des pilotes et personnels est en effet prioritaire car les pièces de rechanges sont (pour l'époque) facilement disponibles. La soute est ainsi plutôt utilisée pour le transport de courrier.

Le premier COD opérationnel : le TBM-3R.
Le premier COD opérationnel : le TBM-3R. © US Navy
Le premier COD opérationnel : le TBM-3R.

La fin des années 50 montre la faiblesse du TBM-3R : il est devenu trop vieux et sa soute cargo est trop petite. Grumman propose alors un successeur ; le C-1 Trader. Ce nouvel appareil est beaucoup plus grand que le TBM-3R et se base sur le chasseur de sous-marins S-2 Tracker vidé de ses capteurs et de sa soute. Le C-1 peut transporter 9 passagers ou 3,8 tonnes de cargo. Les premiers avions entrent en service actif en 1955. 

Mais l'aéronavale américaine grossit de plus en plus, la taille et la complexité des appareils ne ressemblent plus du tout aux avions utilisés en Corée. L'US Navy a besoin d'un transporteur de fret et le C-1 devient très vite trop petit pour acheminer les différentes pièces détachées des appareils. Grumman revient encore une fois avec un nouveau COD, basé sur l'avion de guet radar E-2 Hawkeye. Cependant, Grumman ne va pas se contenter d'enlever les appareils de détection radar mais de développer un avion entièrement pensé pour son rôle de COD.

C-1 Trader.
Le C-1 Trader, le cargo de l'aéronavale américaine au début de la guerre froide. © US Navy
C-1 Trader.

Le C-2 comprend ainsi une rampe cargo à l'arrière (au contraire d'une porte sur le côté droit du C-1) pour acheminer des pièces de grande taille et de permettre un chargement/déchargement rapide, un système de fixation est aussi pensé spécifiquement à la soute pour sécuriser tout chargement que le C-2 pourrait emporter.

Ils commencent donc à remplacer les C-1 en 1966. Ces appareils volent encore aujourd'hui, même s'il s'agit d'une version modernisée, le C-2A, introduite à la fin des années 1980. Ces avions sont capables de transporter 26 passagers ou 4,5 tonnes d'équipements. La plupart des vols sont toutefois effectués dans une configuration mixte passager/cargo.

Le C-2A sur le pont d'un porte-avion américain, avec ses ailes repliées.
Un C-2A sur le pont d'un porte-avion américain, avec ses ailes repliées. © Northrop Grumman
Le C-2A sur le pont d'un porte-avion américain, avec ses ailes repliées.

Un nouveau COD opérationnel dans l'US Navy

Au début des années 2010, le Pentagone cherche déjà le futur COD de la Navy. L'US Navy est alors dans une optique de standardisation des appareils embarqués ; il faudra que le COD deviennent un appareil multifonction et pas seulement un avion de liaison entre la terre ferme et le porte-avions. C'est à cette occasion que Boeing et Bell Helicopter proposent une version modifiée du Osprey du Corps des Marines. Cette version sera officiellement choisie en 2015 comme le remplaçant du C-2A.

Le nouveau COD, dénommé CMV-22B, est ainsi basé sur le MV-22B Osprey sur lequel la capacité d'emport en kérosène a été augmentée et une radio haute fréquence et un système Public Address (PA) ont été ajoutés. L'appareil descend ainsi d'une famille de tiltrotor testé et approuvé en opérations (en dehors des 3 ajouts), permettant à la Marine américaine de réduire les essais et le développement des schémas d'entrainements des pilotes, des techniciens, etc...

Depuis le 18 février 2022, le CMV-22B a obtenu la confirmation de son initial operating capability (IOC) au sein de l'US Navy (l'appareil est autonome en termes de maintenance et opérationnel dans toutes ses missions au sein d'une escadrille) après son premier déploiement.

 L'US Navy dispose alors d'un appareil multifonction bien plus efficace que le C-2A :

  • transport de 23 passagers ou de 5 tonnes de matériels à longue distance
  • contrairement au C-2A, le CMV-22B est ravitaillable en vol
  • soutien logistique aux unités navales proches et lointaine : il peut apponter ou livrer du fret sous élingue à des navires se trouvant au sein de l'escadre ou se situant loin de cette dernière. Avec le C-2A, il fallait transborder les marchandises et les hommes dans des hélicoptères n'ayant pas le même rayon d'action ou la même capacité de transport que le CMV-22B.

La Marine américaine compte recevoir 44 CMV-22B.

Le CMV-22 effectuant des essais sur un LPD. Cet appareil permettra de ravitailler des navires qui se trouvent éloignés du groupe aéronaval.
Le CMV-22B effectuant des essais sur un LPD. Cet appareil permettra de ravitailler des navires qui se trouvent éloignés du groupe aéronaval. © US Navy
Le CMV-22 effectuant des essais sur un LPD. Cet appareil permettra de ravitailler des navires qui se trouvent éloignés du groupe aéronaval.

Un COD dans la Marine nationale ?

Le principe de COD est seulement utilisé au sein de la Marine américaine. Le Charles de Gaulle et son groupe aérien embarqué n'ont pas besoin d'un COD, puisque le groupe aéronaval français n'est en générale pas loin de ports français ou alliés. Cela permet au ravitailleur d'escadre de faire quelques aller-retours en fonction des besoins du groupe aéronaval sans que celui-ci ne doivent subir un manque en matériels.

Il n'existe qu'une seule exception mais qui n'implique en aucun un manque de soutien logistique mais plus une volonté d'action très rapide demandant une logistique plus accrue : il s'agit de l'opération Harmattan en Libye en 2011. Le porte-avions est alors complètement intégré au sein des forces de la coalition mais la chaine logistique est fortement étendue par la volonté d'entrer très rapidement en action. Les États-Unis proposent alors de prêter pendant deux semaines deux C-2A pour effectuer des rotations entre la base de l'aéronautique navale de Hyères (Provence-Alpes-Côte d'Azur) et le porte-avions Charles de Gaulle. Ce soutien logistique a alors permit à la Marine nationale de monter en puissance très rapidement tout en soulageant la chaine logistique de l'escadre.

C-2A Greyhound en phase d'appontage sur le porte-avion Charles de Gaulle.
Gage de l'interopérabilité entre la Marine nationale et l'US Navy, le C-2A fait partie des avions capables d'apponter et d'être catapulté depuis le Charles de Gaulle. © US Navy
C-2A Greyhound en phase d'appontage sur le porte-avion Charles de Gaulle.
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23/02/2022 08:30
1255 mots

L'US Navy monte en puissance avec la mise en service de ses premiers Osprey

Annoncé en 2017, le CMV-22B Osprey est en train de remplacer les premiers C-2A Greyhound de la Marine américaine. Ce remplacement a justement franchit une étape importante le 17 février 2022. En effet, le CMV-22B a reçu son Initial Operating Capability.

L'US Navy monte en puissance avec la mise en service de ses premiers Osprey
L'US Navy monte en puissance avec la mise en service de ses premiers Osprey

La fin des années 50 montre la faiblesse du TBM-3R : il est devenu trop vieux et sa soute cargo est trop petite. Grumman propose alors un successeur ; le C-1 Trader. Ce nouvel appareil est beaucoup plus grand que le TBM-3R et se base sur le chasseur de sous-marins S-2 Tracker vidé de ses capteurs et de sa soute. Le C-1 peut transporter 9 passagers ou 3,8 tonnes de cargo. Les premiers avions entrent en service actif en 1955. 

Mais l'aéronavale américaine grossit de plus en plus, la taille et la complexité des appareils ne ressemblent plus du tout aux avions utilisés en Corée. L'US Navy a besoin d'un transporteur de fret et le C-1 devient très vite trop petit pour acheminer les différentes pièces détachées des appareils. Grumman revient encore une fois avec un nouveau COD, basé sur l'avion de guet radar E-2 Hawkeye. Cependant, Grumman ne va pas se contenter d'enlever les appareils de détection radar mais de développer un avion entièrement pensé pour son rôle de COD.

Le concept de Carrier Onboard Delivery (COD)

Le concept apparait au début de la Seconde Guerre mondiale, au sein de l'US Navy ; ses navires doivent s'éloigner des bases logistiques alliées sans avoir la possibilité de se ravitailler en hommes et matériels. Les hydravions sont ainsi utilisés pour relier les flottilles aux différents ports. Leur grand rayon d'action leur permet de couvrir une très grande distance mais ils ne peuvent apponter sur le porte-avions et encore moins s'y amarrer (à cause des ailes, pas du tout prévues dans cette optique), obligeant les navires à s'arrêter au risque de se faire attaquer.

A la fin de la guerre, l'US Navy décide alors de modifier des bombardiers-torpilleurs TBF-Avenger en avion cargo ; le TBM-3R devient le premier COD de la Marine. La tourelle est enlevée, la soute à munition devient une soute cargo et une porte sur la droite de l'appareil est ajoutée. L'avion peut ainsi transporter 500 kg de matériel ou 6 passagers en plus du pilote. Le transport des pilotes et personnels est en effet prioritaire car les pièces de rechanges sont (pour l'époque) facilement disponibles. La soute est ainsi plutôt utilisée pour le transport de courrier.

Le premier COD opérationnel : le TBM-3R.
Le premier COD opérationnel : le TBM-3R. © US Navy
Le premier COD opérationnel : le TBM-3R.
C-1 Trader.
Le C-1 Trader, le cargo de l'aéronavale américaine au début de la guerre froide. © US Navy
C-1 Trader.

Le C-2 comprend ainsi une rampe cargo à l'arrière (au contraire d'une porte sur le côté droit du C-1) pour acheminer des pièces de grande taille et de permettre un chargement/déchargement rapide, un système de fixation est aussi pensé spécifiquement à la soute pour sécuriser tout chargement que le C-2 pourrait emporter.

Ils commencent donc à remplacer les C-1 en 1966. Ces appareils volent encore aujourd'hui, même s'il s'agit d'une version modernisée, le C-2A, introduite à la fin des années 1980. Ces avions sont capables de transporter 26 passagers ou 4,5 tonnes d'équipements. La plupart des vols sont toutefois effectués dans une configuration mixte passager/cargo.

Le C-2A sur le pont d'un porte-avion américain, avec ses ailes repliées.
Un C-2A sur le pont d'un porte-avion américain, avec ses ailes repliées. © Northrop Grumman
Le C-2A sur le pont d'un porte-avion américain, avec ses ailes repliées.

Un nouveau COD opérationnel dans l'US Navy

Au début des années 2010, le Pentagone cherche déjà le futur COD de la Navy. L'US Navy est alors dans une optique de standardisation des appareils embarqués ; il faudra que le COD deviennent un appareil multifonction et pas seulement un avion de liaison entre la terre ferme et le porte-avions. C'est à cette occasion que Boeing et Bell Helicopter proposent une version modifiée du Osprey du Corps des Marines. Cette version sera officiellement choisie en 2015 comme le remplaçant du C-2A.

Le nouveau COD, dénommé CMV-22B, est ainsi basé sur le MV-22B Osprey sur lequel la capacité d'emport en kérosène a été augmentée et une radio haute fréquence et un système Public Address (PA) ont été ajoutés. L'appareil descend ainsi d'une famille de tiltrotor testé et approuvé en opérations (en dehors des 3 ajouts), permettant à la Marine américaine de réduire les essais et le développement des schémas d'entrainements des pilotes, des techniciens, etc...

Depuis le 18 février 2022, le CMV-22B a obtenu la confirmation de son initial operating capability (IOC) au sein de l'US Navy (l'appareil est autonome en termes de maintenance et opérationnel dans toutes ses missions au sein d'une escadrille) après son premier déploiement.

 L'US Navy dispose alors d'un appareil multifonction bien plus efficace que le C-2A :

  • transport de 23 passagers ou de 5 tonnes de matériels à longue distance
  • contrairement au C-2A, le CMV-22B est ravitaillable en vol
  • soutien logistique aux unités navales proches et lointaine : il peut apponter ou livrer du fret sous élingue à des navires se trouvant au sein de l'escadre ou se situant loin de cette dernière. Avec le C-2A, il fallait transborder les marchandises et les hommes dans des hélicoptères n'ayant pas le même rayon d'action ou la même capacité de transport que le CMV-22B.

La Marine américaine compte recevoir 44 CMV-22B.

Le CMV-22 effectuant des essais sur un LPD. Cet appareil permettra de ravitailler des navires qui se trouvent éloignés du groupe aéronaval.
Le CMV-22B effectuant des essais sur un LPD. Cet appareil permettra de ravitailler des navires qui se trouvent éloignés du groupe aéronaval. © US Navy
Le CMV-22 effectuant des essais sur un LPD. Cet appareil permettra de ravitailler des navires qui se trouvent éloignés du groupe aéronaval.

Un COD dans la Marine nationale ?

Le principe de COD est seulement utilisé au sein de la Marine américaine. Le Charles de Gaulle et son groupe aérien embarqué n'ont pas besoin d'un COD, puisque le groupe aéronaval français n'est en générale pas loin de ports français ou alliés. Cela permet au ravitailleur d'escadre de faire quelques aller-retours en fonction des besoins du groupe aéronaval sans que celui-ci ne doivent subir un manque en matériels.

Il n'existe qu'une seule exception mais qui n'implique en aucun un manque de soutien logistique mais plus une volonté d'action très rapide demandant une logistique plus accrue : il s'agit de l'opération Harmattan en Libye en 2011. Le porte-avions est alors complètement intégré au sein des forces de la coalition mais la chaine logistique est fortement étendue par la volonté d'entrer très rapidement en action. Les États-Unis proposent alors de prêter pendant deux semaines deux C-2A pour effectuer des rotations entre la base de l'aéronautique navale de Hyères (Provence-Alpes-Côte d'Azur) et le porte-avions Charles de Gaulle. Ce soutien logistique a alors permit à la Marine nationale de monter en puissance très rapidement tout en soulageant la chaine logistique de l'escadre.

C-2A Greyhound en phase d'appontage sur le porte-avion Charles de Gaulle.
Gage de l'interopérabilité entre la Marine nationale et l'US Navy, le C-2A fait partie des avions capables d'apponter et d'être catapulté depuis le Charles de Gaulle. © US Navy
C-2A Greyhound en phase d'appontage sur le porte-avion Charles de Gaulle.


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