Le budget de la Défense américain, en hausse comme chaque année, confirme indirectement les difficultés rencontrées par le F-35 en renforçant la flotte de chasseurs de 4ème génération et en lui imposant un ultimatum.
Un budget de la Défense en forte hausse
Le comité des forces armées du Sénat américain a publié un acte d'autorisation d'engagement modifié (National Defense Authorization Act) par rapport aux programmations initialement proposées. Le budget initial, approuvé à 715 milliards de dollars par le Président Joe Biden, a été révisé à 768 milliards de dollars d'autorisation de paiement, permettant d'accroître le volume de certaines acquisitions ou la R&D dans des domaines critiques, mais aussi d'augmenter les salaires de tous les militaires de 2,7%.
Le développement de nouvelles technologies ainsi que la tenue des essais et évaluations atteint 117,8 milliards de dollars contre 112 milliards prévus, un niveau record. Ce sont principalement les armes hypersoniques, les technologies spatiales et cyber, la micro-électronique et l'intelligence artificielle qui doivent bénéficier de ces fonds. L'avion de chasse de 6ème génération NGAD, qui possède une déclinaison pour l'Air Force et une pour la Navy, voit sont développement garanti, ainsi que le programme d'avion d'entraînement T-7A Red Hawk.
Les avions de 4ème génération font de la résistance
L'US Air Force peut acquérir 48 nouveaux F-35A et recevra également 17 exemplaires supplémentaires du F-15EX de Boeing au lieu des 12 initialement validés, mais le comité interdit expressément à l'US Air Force de réduire son parc du moindre A-10 Thunderbold II supplémentaire. L'appareil spécialisé dans le CAS (Close Air Support, ou appui-feu aérien) est très apprécié pour sa robustesse, ses faibles coûts opérationnels et son efficacité, mais que les responsable de l'US Air Force aimeraient voir disparaître au profit de son successeur le F-35 et d'une focalisation supérieure de l'aviation de combat vers la haute intensité et la Chine... Des propos réitérés par le secrétaire de l'Air Force Frank Kendall pas plus tard que samedi dernier au Reagan National Defense Forum.
De son côté, l'US Navy pourra acquérir 12 nouveaux chasseurs F/A-18E/F Super Hornet.
L'avenir du F-35 toujours en suspens
Il s'agit d'un double camouflet pour l'avion de cinquième génération de Lockheed Martin, confirmant que ses 871 défauts encore répertoriés en début d'année 2021 sont loin d'être réglés et qu'il n'a pas acquis la confiance des troupes qui comptent sur le soutien aérien en opérations. L'accroissement du nombre de F-15 et F/A-18 au dernier standard est également une marque de défiance envers le F-35, les autorités ayant répété que si la trajectoire du F-35 restait mauvaise, une baisse des commandes pourrait être actée et compensée par une accélération du développement de son successeur le NGAD tout en renforçant la flotte d'avions de 4ème génération supplémentaires, permettant une transition en douceur.
L'US Navy et le corps des Marines n'ont le droit d'acquérir que 37 F-35 dans les versions B et C cette année, et les futurs NDAA pourraient encore réduire les acquisitions de l'avion dans le courant de la décennie afin de contenir ses frais de maintien en conditions opérationnelle. Sans une baisse drastique des coûts de possession de l'avion à horizon 2027, l'Air Force n'aurait pas le droit de dépasser 1 763 F-35A, la Navy 273 F-35C, et le Corps des Marines aurait 353 F-35B et 67 F-35C. Plus aucun contrat concernant l'avion ne pourra être signé sans une obligation de réduction de coût d'exploitation, d'amélioration de ses performances ou de sa disponibilité. Loin de la flotte initialement envisagée et déja révisée à la baisse par deux fois.
Les renouvellement autorisées
Les 16 exemplaires de l'E-8 JSTARS, appareils de suivi des troupes terrestres ennemies fournis par Northrop sur la base d'un Boeing 707 et capale de surveiller jusqu'à 50 000 km² de terrain, vont pouvoir être remplacés à partir de 2023, plus de 30 ans après leur entrée en service en 1991. L'appareil choisi n'est pas encore connu, même si Boeing serait le mieux placé avec une version adaptée de son avion P-8 Poséidon de patrouille maritime équipé d'un radar à antenne active AESA et d'un système de gestion de la mission BM2C (Battle Management Command & Control).
L'EC-37B Compass Call, appareil de guerre électronique offensive basé sur le Gulfstream G550 CAEW et équipé de l'ensemble SABER de BAE Systems, pourra port sa part entrer en service en 2024, en remplacement du Lockheed Martin EC-130H entré en service en 1982.
Le comité autorise le retrait du service de vieux Hercules C-130 et de 44 ravitailleurs (26 KC-10 et 18 KC-135), tout en demandant des informations rapides quant au programme d'acquisition de nouveaux avions ravitailleurs dans lequel le KC-46 de Boeing est en compétition avec le binôme Airbus / Lockheed Martin pour proposer une version américainsée et assemblée aux Etats-Unis de son A330 MRTT.
Du côté des drones, l'Army pourra acquérir un MQ-1 Gray Eagle, et l'Air Force quatre MQ-9 Reaper.
Basculement stratégique vers le Pacifique
Sur le plan international, 7,1 Md$ sont désormais consacrés à la dissuasion dans le Pacifique pour faire face à la montée en puissance de la Chine, contre "seulement" 2,2 Md$ l'an dernier. La zone devient ainsi la première en terme de dépenses, 4Md$ étant consacrés à l'European deterrence Initiative. L'enveloppe européenne comprend notamment près notamment un soutien aux forces armées ukrainiennes atteint à hauteur de 300 millions de dollars, contre 250 millions budgétés par le Président américain.