Rébellion des Houthis : quels moyens aériens et anti-aériens pour faire face à l'Arabie Saoudite ?
Rébellion des Houthis : quels moyens aériens et anti-aériens pour faire face à l'Arabie Saoudite ?

publié le 10 décembre 2022 à 15:21

1619 mots

Rébellion des Houthis : quels moyens aériens et anti-aériens pour faire face à l'Arabie Saoudite ?

Depuis plusieurs années, la rébellion Houthi parvient à faire face à une coalition dirigée par l'Arabie Saoudite. Malgré le différentiel de capacité militaire et l'épuisement des stocks de missiles capturés auprès du gouvernement, la rébellion dispose toujours d'une capacité de frappe et de système de défense aérienne.


Comment les Houthis se sont-ils armés ?

Les Houthis (Ansar Allah) sont un groupe rebelle armé zaydite originaire du Nord du Yémen et plus particulièrement de la vile de Saada. Sur un fond de revendications sociales et économiques, l’organisation entre en conflit ouvert avec le gouvernement yéménite en 2014. Ce dernier, présidé par Abdrabbo Mansour Hadi, obtient le soutien de l’Arabie Saoudite, qui lance l’opération Tempête Décisive en mars 2015. Les saoudiens sont à la tête de la coalition arabe, qui réunit une dizaine de nations prête à aider le gouvernement légitime du Yémen à reprendre le pays. Les Houthis et les forces gouvernementales, soutenus par la coalition, s’affrontent depuis, pour le contrôle de la nation. Un cessez-le feu historique avait été mis en place le 2 avril de cette année, il fut reconduit à deux reprises avant de prendre fin ce 2 octobre. Aujourd’hui, la crainte de la reprise des combats dans le pays de la péninsule arabique augmente, alors que le Yémen est déjà ravagé par plus de 8 ans de guerre.

Dans cette guerre, les Houthis peuvent compter sur le soutien de l’Iran ; il est marginal au début de la guerre mais prend de l’importance au fur et à mesure de l’évolution du conflit. La république islamique est en « guerre froide » contre les monarchies du Golfe et en particulier l’Arabie Saoudite, pour étendre son influence à travers le Moyen-Orient, l’Iran soutient des groupes rebelles. Le Hezbollah au Liban, le Hamas en Palestine, le Liwa Zainebiyoun en Syrie, l’organisation Badr en Irak et bien d’autres bénéficient ainsi d’une aide militaire (transferts d’armes, de technologies et entrainement des milices). 

Qaher M2.jpg
Le missile Qaher M2 estd érivé des missiles V-750 du système anti-aérien soviétique SA-2. ©
Qaher M2.jpg

Bien qu’issus d’une branche différente du chiisme, les Houthis ont eux aussi reçu le soutien iranien. Il est rendu possible par les unités 190 et 400 de la force Al-Quds des gardiens de la révolution. Selon certaines sources, l’officier iranien responsable du soutien à Ansar Allah serait Abdolreza Shahlaei, un vétéran des campagnes d’aide aux milices anti-Américaines dans la région. Il avait été visé par une frappe de drone américain en janvier 2020, tout comme Qasseim Soleimani, mais il aurait survécu. L’Iran est le seul soutien majeur au groupe rebelle et le pays chercherait par ce biais à occuper son ennemi saoudien sur son flanc sud, en l’entraînant dans un conflit long, périlleux et extrêmement coûteux.

Les moyens aériens et anti-aériens des Houthis sont une composante importante de ce conflit, ils sont la plus importante capacité de lutte du groupe, car il leurs permettent de frapper leur ennemi majeur, l’Arabie Saoudite, chez elle et de remettre en question leur plus grand avantage, la supériorité aérienne. Ils acquièrent ces systèmes de deux manières : via la contrebande et en créant localement. Les rebelles annoncent régulièrement le développement de technologies domestiques (missiles, drones, …) mais il a été prouvé que dans la majorité des cas, les projets sont alimentés par des transferts de technologies et de matériaux de provenance iranienne.

Moyens de lutte anti-aérienne

Au début de la guerre, de nombreuses unités de l’armée yéménite rejoignent le camp des Houthis, et parmi elles, certains régiments de défense anti-aérienne. Le groupe rebelle acquiert alors de nombreux systèmes soviétiques obsolètes ou en état douteux, notamment des SA-2, SA-3, SA-6 et des SA-9. Une partie de ces systèmes et la majorité des sites de défense anti-aérienne en territoire rebelle seront détruit dès le début de l’intervention de la coalition arabe lors de bombardements. Ansar Allah utilisent néanmoins un système « local » appelé Fatir-1 qu’il présente comme une amélioration du SA-6, qui aurait permis la destruction de deux drones MQ9 Reaper américains.

Face au manque de moyens, le groupe est forcé à improviser ; il convertit alors des missiles air-air soviétiques AA-11 et AA-10 en projectiles SOL-AIR, qu’ils placent à l’arrière de pick-up (technicals).  Les Houthis affirment avoir détruit un F-16 saoudien en février 2017 et endommagé des F-15 de la coalition grâce à cette technique.

La coalition arabe a également intercepté des morceaux de missiles Sayyad-2C (missile sol-air iranien) en cours d’acheminement vers les rebelles ; il est donc extrêmement probable que ces derniers soient en possession de cette arme.

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Missile anti aérien tiré depuis l'épaule Misagh 2 fourni par l'Iran ©
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Missiles de croisière et missiles balistiques

Depuis le début de la guerre (attaque de la base de Safer le 4 septembre 2015) et jusqu’à récemment (attentat du 18 janvier 2020 à Marib), les Houthis ont fait usage de missiles sol-sol afin de frapper en profondeur la coalition.

Au début de la guerre, les Houthis s’emparent de stocks de l’armée yéménite. Ils prennent alors possession de missiles Tochka-U ainsi que de nombreux missiles de la famille des SCUD soviétiques : des SCUD B, la copie nord-coréenne de ce dernier le Hwasong 5 et des Hwasong 6 (copie des SCUD C).

Cette famille de système connaitra des améliorations locales qui donneront les Borkan 1 et 2. Les séparatistes convertissent également des missiles V-750 du système anti-aérien SA-2 en missiles   sol-sol appelés Qaher 1 et 2 qui sont peu précis. L’ensemble des stocks de ces systèmes semble désormais être épuisé.

Les artisans armuriers de la péninsule arabique fabriquent également des systèmes d’artillerie plus classiques, notamment des roquettes non guidées montées sur des pick-up (Badr-1, Badr-1P, Badr-F) qui sont fabriquées à partir de tubes d’acier issus de l’industrie pétrolière.

Avec la disparition progressive des moyens de frappe issus des arsenaux yéménites, les Houthis se sont tournés vers l’Iran afin de s’approvisionner. Ainsi, la république islamique aurait fourni des missiles Zelzal 3 selon l’Arabie Saoudite mais également, d’après un groupe d’experts de l’ONU, des missiles Qiam-1 en version allégée à son allié non-officiel. Ce dernier est renommé par les Houthis Borkan 2H, ce qui nourrit une certaine confusion autour de la nature de cet engin. Il est certain que l’Iran a transféré une multitude d’autres armes du même genre, mais il est difficile de confirmer quels systèmes les rebelles possèdent réellement.

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Missile Tochka-U récupéré par les Houthis, notamment utilisé avec succès contre une base navale saoudienne ©
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Drones et munitions rôdeuses

L’année 2018 marque un tournant dans la doctrine de guerre du groupe. Les drones deviennent peu à peu une de leurs armes de choix en combinaison avec les missiles balistiques, en témoigne la spectaculaire attaque sur les aéroports de Dubaï et d’Abou Dhabi en 2018.

Pour guider des frappes et collecter des renseignements sur le champ de bataille ils peuvent compter sur plusieurs modèles de drone de reconnaissance : le Hudhud 1 (30 kilomètres de portée pour 90 minutes de vol), le Raqib (15 kilomètres de portée pour 90 minutes d’autonomie) et le Rased (35 kilomètres de portée avec une autonomie de 25 minutes, modèle très similaire au Skywalker 8-X chinois).

Pour frapper, les Houthis disposent de système d’origine iranienne (donnés ou transferts de technologies) comme le Qasef 1, une copie quasi-conforme des Ababil 2 et Ababil 3 iranien, avec une charge de 30 kg d’explosifs. Ils ont également des drones sans équivalent et donc probablement développés localement, peut-être avec l’aide de conseillers, notamment le Samad 2 et le Samad 3. Ces drones kamikazes/munitions rôdeuses auraient été utilisés afin de frapper des sites pétroliers du géant Aramco en aout 2019.

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Le Qasef 1 est souvent considéré comme une munition rodeuse ou un drone kamikaze, mais sa classification devrait plutôt le rapprocher de la catégorie des missiles low cost... © US DoD
qasef.jpg
Ababil 2.png
Ababil 2.png ©
Ababil 2.png
drone houthi.png
drone houthi.png ©
drone houthi.png

Le drone que les Houthis disent avoir développés (image de droite) ressemble énormément au drone Ababil 2 iranien (à gauche).

Conclusion et prospectives

Du 2 avril au 2 octobre de cette année, une trêve a mis en pause les hostilités entre les Houthis, la coalition arabe et le gouvernement yéménite. L’absence d’opérations militaires majeures et de campagnes de bombardements a offert aux civils un court temps de répit salvateur. Ces 7 années de guerre ont plongé le pays dans une des pires crises humanitaires du siècle selon l’ONU. Aujourd’hui, la trêve est terminée et le Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme des Nations Unies milite plus que jamais pour qu’un accord soit trouvé entre les belligérants.

La récente montée des tensions entre l’Iran, les Etats Unis et leurs alliés (notamment l’Arabie Saoudite et Israël) au Moyen Orient, sur le fond des révoltes populaires qui agitent la république islamique, pourrait être un élément motivateur des « proxy-Wars » à travers la région, en particulier au Yémen.

Le retrait progressif des Etats-Unis de la région dans le cadre du basculement vers l’Indopacifique risque de limiter l’aide américaine à la coalition (renseignement entre autres), même si le pays reste engagé sur la question iranienne et se réengage parfois de nouveau (théâtre somalien). Si les pays du Golfe souhaitent continuer la guerre, ils vont être obligés de s’investir d’avantage alors que le conflit semble déjà être un gouffre financier. De plus, les ventes d’armes et de technologies des pays européens aux membres de la coalition pourrait ralentir, suite aux nombreuses accusations d’ONG concernant l’utilisation de systèmes occidentaux pour commettre des crimes de guerre pendant la guerre.

L’appauvrissement et la destruction du Yémen sont des enjeux majeurs. Le pays sous blocus permanent est en proie aux famines et aux maladies. La majorité de la population n’a pas ou n’a que partiellement accès à l’eau, l’électricité, aux soins et aux services publics de base tels que l’éducation. Les mines, tirs de sniper et les bombardements affectent fortement les populations locales. Il est certain, et ce peu importe l’issue du conflit, que le pays soit gravement déstabilisé dans les décennies à venir.

Il est vraisemblable que l’Iran va continuer de livrer des armes, des technologies et de l’aide aux Houthis, tout en continuant d’entraîner ses combattants, afin de déstabiliser au maximum la frontière Sud de l’Arabie Saoudite. La portée et la dangerosité des systèmes qu’acquièrent les Houthis sont croissantes, ce qui fait peser un risque de plus en plus grand pour les monarchies du Golfe. Ceux-ci investissent donc de plus en plus dans des systèmes de défenses anti-aériennes. Le risque reste grand pour les cibles stratégiques (sites pétroliers, sites militaires, …), les autorités militaires et les lieux fortement fréquentés, afin de maintenir un climat anxiogène auprès de la population.

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10/12/2022 15:21
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Rébellion des Houthis : quels moyens aériens et anti-aériens pour faire face à l'Arabie Saoudite ?

Depuis plusieurs années, la rébellion Houthi parvient à faire face à une coalition dirigée par l'Arabie Saoudite. Malgré le différentiel de capacité militaire et l'épuisement des stocks de missiles capturés auprès du gouvernement, la rébellion dispose toujours d'une capacité de frappe et de système de défense aérienne.

Rébellion des Houthis : quels moyens aériens et anti-aériens pour faire face à l'Arabie Saoudite ?
Rébellion des Houthis : quels moyens aériens et anti-aériens pour faire face à l'Arabie Saoudite ?

Drones et munitions rôdeuses

L’année 2018 marque un tournant dans la doctrine de guerre du groupe. Les drones deviennent peu à peu une de leurs armes de choix en combinaison avec les missiles balistiques, en témoigne la spectaculaire attaque sur les aéroports de Dubaï et d’Abou Dhabi en 2018.

Pour guider des frappes et collecter des renseignements sur le champ de bataille ils peuvent compter sur plusieurs modèles de drone de reconnaissance : le Hudhud 1 (30 kilomètres de portée pour 90 minutes de vol), le Raqib (15 kilomètres de portée pour 90 minutes d’autonomie) et le Rased (35 kilomètres de portée avec une autonomie de 25 minutes, modèle très similaire au Skywalker 8-X chinois).

Pour frapper, les Houthis disposent de système d’origine iranienne (donnés ou transferts de technologies) comme le Qasef 1, une copie quasi-conforme des Ababil 2 et Ababil 3 iranien, avec une charge de 30 kg d’explosifs. Ils ont également des drones sans équivalent et donc probablement développés localement, peut-être avec l’aide de conseillers, notamment le Samad 2 et le Samad 3. Ces drones kamikazes/munitions rôdeuses auraient été utilisés afin de frapper des sites pétroliers du géant Aramco en aout 2019.

Comment les Houthis se sont-ils armés ?

Les Houthis (Ansar Allah) sont un groupe rebelle armé zaydite originaire du Nord du Yémen et plus particulièrement de la vile de Saada. Sur un fond de revendications sociales et économiques, l’organisation entre en conflit ouvert avec le gouvernement yéménite en 2014. Ce dernier, présidé par Abdrabbo Mansour Hadi, obtient le soutien de l’Arabie Saoudite, qui lance l’opération Tempête Décisive en mars 2015. Les saoudiens sont à la tête de la coalition arabe, qui réunit une dizaine de nations prête à aider le gouvernement légitime du Yémen à reprendre le pays. Les Houthis et les forces gouvernementales, soutenus par la coalition, s’affrontent depuis, pour le contrôle de la nation. Un cessez-le feu historique avait été mis en place le 2 avril de cette année, il fut reconduit à deux reprises avant de prendre fin ce 2 octobre. Aujourd’hui, la crainte de la reprise des combats dans le pays de la péninsule arabique augmente, alors que le Yémen est déjà ravagé par plus de 8 ans de guerre.

Dans cette guerre, les Houthis peuvent compter sur le soutien de l’Iran ; il est marginal au début de la guerre mais prend de l’importance au fur et à mesure de l’évolution du conflit. La république islamique est en « guerre froide » contre les monarchies du Golfe et en particulier l’Arabie Saoudite, pour étendre son influence à travers le Moyen-Orient, l’Iran soutient des groupes rebelles. Le Hezbollah au Liban, le Hamas en Palestine, le Liwa Zainebiyoun en Syrie, l’organisation Badr en Irak et bien d’autres bénéficient ainsi d’une aide militaire (transferts d’armes, de technologies et entrainement des milices). 

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Le missile Qaher M2 estd érivé des missiles V-750 du système anti-aérien soviétique SA-2. ©
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Bien qu’issus d’une branche différente du chiisme, les Houthis ont eux aussi reçu le soutien iranien. Il est rendu possible par les unités 190 et 400 de la force Al-Quds des gardiens de la révolution. Selon certaines sources, l’officier iranien responsable du soutien à Ansar Allah serait Abdolreza Shahlaei, un vétéran des campagnes d’aide aux milices anti-Américaines dans la région. Il avait été visé par une frappe de drone américain en janvier 2020, tout comme Qasseim Soleimani, mais il aurait survécu. L’Iran est le seul soutien majeur au groupe rebelle et le pays chercherait par ce biais à occuper son ennemi saoudien sur son flanc sud, en l’entraînant dans un conflit long, périlleux et extrêmement coûteux.

Les moyens aériens et anti-aériens des Houthis sont une composante importante de ce conflit, ils sont la plus importante capacité de lutte du groupe, car il leurs permettent de frapper leur ennemi majeur, l’Arabie Saoudite, chez elle et de remettre en question leur plus grand avantage, la supériorité aérienne. Ils acquièrent ces systèmes de deux manières : via la contrebande et en créant localement. Les rebelles annoncent régulièrement le développement de technologies domestiques (missiles, drones, …) mais il a été prouvé que dans la majorité des cas, les projets sont alimentés par des transferts de technologies et de matériaux de provenance iranienne.

Moyens de lutte anti-aérienne

Au début de la guerre, de nombreuses unités de l’armée yéménite rejoignent le camp des Houthis, et parmi elles, certains régiments de défense anti-aérienne. Le groupe rebelle acquiert alors de nombreux systèmes soviétiques obsolètes ou en état douteux, notamment des SA-2, SA-3, SA-6 et des SA-9. Une partie de ces systèmes et la majorité des sites de défense anti-aérienne en territoire rebelle seront détruit dès le début de l’intervention de la coalition arabe lors de bombardements. Ansar Allah utilisent néanmoins un système « local » appelé Fatir-1 qu’il présente comme une amélioration du SA-6, qui aurait permis la destruction de deux drones MQ9 Reaper américains.

Face au manque de moyens, le groupe est forcé à improviser ; il convertit alors des missiles air-air soviétiques AA-11 et AA-10 en projectiles SOL-AIR, qu’ils placent à l’arrière de pick-up (technicals).  Les Houthis affirment avoir détruit un F-16 saoudien en février 2017 et endommagé des F-15 de la coalition grâce à cette technique.

La coalition arabe a également intercepté des morceaux de missiles Sayyad-2C (missile sol-air iranien) en cours d’acheminement vers les rebelles ; il est donc extrêmement probable que ces derniers soient en possession de cette arme.

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Missile anti aérien tiré depuis l'épaule Misagh 2 fourni par l'Iran ©
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Missiles de croisière et missiles balistiques

Depuis le début de la guerre (attaque de la base de Safer le 4 septembre 2015) et jusqu’à récemment (attentat du 18 janvier 2020 à Marib), les Houthis ont fait usage de missiles sol-sol afin de frapper en profondeur la coalition.

Au début de la guerre, les Houthis s’emparent de stocks de l’armée yéménite. Ils prennent alors possession de missiles Tochka-U ainsi que de nombreux missiles de la famille des SCUD soviétiques : des SCUD B, la copie nord-coréenne de ce dernier le Hwasong 5 et des Hwasong 6 (copie des SCUD C).

Cette famille de système connaitra des améliorations locales qui donneront les Borkan 1 et 2. Les séparatistes convertissent également des missiles V-750 du système anti-aérien SA-2 en missiles   sol-sol appelés Qaher 1 et 2 qui sont peu précis. L’ensemble des stocks de ces systèmes semble désormais être épuisé.

Les artisans armuriers de la péninsule arabique fabriquent également des systèmes d’artillerie plus classiques, notamment des roquettes non guidées montées sur des pick-up (Badr-1, Badr-1P, Badr-F) qui sont fabriquées à partir de tubes d’acier issus de l’industrie pétrolière.

Avec la disparition progressive des moyens de frappe issus des arsenaux yéménites, les Houthis se sont tournés vers l’Iran afin de s’approvisionner. Ainsi, la république islamique aurait fourni des missiles Zelzal 3 selon l’Arabie Saoudite mais également, d’après un groupe d’experts de l’ONU, des missiles Qiam-1 en version allégée à son allié non-officiel. Ce dernier est renommé par les Houthis Borkan 2H, ce qui nourrit une certaine confusion autour de la nature de cet engin. Il est certain que l’Iran a transféré une multitude d’autres armes du même genre, mais il est difficile de confirmer quels systèmes les rebelles possèdent réellement.

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Missile Tochka-U récupéré par les Houthis, notamment utilisé avec succès contre une base navale saoudienne ©
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Le Qasef 1 est souvent considéré comme une munition rodeuse ou un drone kamikaze, mais sa classification devrait plutôt le rapprocher de la catégorie des missiles low cost... © US DoD
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Ababil 2.png ©
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drone houthi.png ©
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Le drone que les Houthis disent avoir développés (image de droite) ressemble énormément au drone Ababil 2 iranien (à gauche).

Conclusion et prospectives

Du 2 avril au 2 octobre de cette année, une trêve a mis en pause les hostilités entre les Houthis, la coalition arabe et le gouvernement yéménite. L’absence d’opérations militaires majeures et de campagnes de bombardements a offert aux civils un court temps de répit salvateur. Ces 7 années de guerre ont plongé le pays dans une des pires crises humanitaires du siècle selon l’ONU. Aujourd’hui, la trêve est terminée et le Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme des Nations Unies milite plus que jamais pour qu’un accord soit trouvé entre les belligérants.

La récente montée des tensions entre l’Iran, les Etats Unis et leurs alliés (notamment l’Arabie Saoudite et Israël) au Moyen Orient, sur le fond des révoltes populaires qui agitent la république islamique, pourrait être un élément motivateur des « proxy-Wars » à travers la région, en particulier au Yémen.

Le retrait progressif des Etats-Unis de la région dans le cadre du basculement vers l’Indopacifique risque de limiter l’aide américaine à la coalition (renseignement entre autres), même si le pays reste engagé sur la question iranienne et se réengage parfois de nouveau (théâtre somalien). Si les pays du Golfe souhaitent continuer la guerre, ils vont être obligés de s’investir d’avantage alors que le conflit semble déjà être un gouffre financier. De plus, les ventes d’armes et de technologies des pays européens aux membres de la coalition pourrait ralentir, suite aux nombreuses accusations d’ONG concernant l’utilisation de systèmes occidentaux pour commettre des crimes de guerre pendant la guerre.

L’appauvrissement et la destruction du Yémen sont des enjeux majeurs. Le pays sous blocus permanent est en proie aux famines et aux maladies. La majorité de la population n’a pas ou n’a que partiellement accès à l’eau, l’électricité, aux soins et aux services publics de base tels que l’éducation. Les mines, tirs de sniper et les bombardements affectent fortement les populations locales. Il est certain, et ce peu importe l’issue du conflit, que le pays soit gravement déstabilisé dans les décennies à venir.

Il est vraisemblable que l’Iran va continuer de livrer des armes, des technologies et de l’aide aux Houthis, tout en continuant d’entraîner ses combattants, afin de déstabiliser au maximum la frontière Sud de l’Arabie Saoudite. La portée et la dangerosité des systèmes qu’acquièrent les Houthis sont croissantes, ce qui fait peser un risque de plus en plus grand pour les monarchies du Golfe. Ceux-ci investissent donc de plus en plus dans des systèmes de défenses anti-aériennes. Le risque reste grand pour les cibles stratégiques (sites pétroliers, sites militaires, …), les autorités militaires et les lieux fortement fréquentés, afin de maintenir un climat anxiogène auprès de la population.



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