Depuis 1977, les satellites Meteosat nous envoient au quotidien des données et des images des phénomènes atmosphériques, contribuant aux prédictions météorologiques et à l’amélioration des connaissances du milieu terrestre. Une initiative française.
Le 23 novembre 1977, depuis Cape Canaveral, une fusée américaine Thor Delta lançait avec succès Meteosat 1, le premier satellite européen de météorologie, faisant du même coup entrer l’Europe dans le petit club restreint des puissances maîtrisant l’observation terrestre (Etats-Unis, URSS, Japon). A l’aide d’un moteur d’apogée, Meteosat 1 rejoignait l’orbite équatoriale géostationnaire au-dessus de l’océan Atlantique. Mis à poste le 7 décembre, il envoyait sa première image deux jours plus tard.
Principales caractéristiques.
Haut de 3,2 m, pour un diamètre de 2,1 m et une masse de 697 kg (avec son moteur d’apogée), Meteosat 1 ressemble à un cylindre sur lequel se trouvent les panneaux solaires, mais aussi des structures correspondant notamment aux propulseurs et capteurs. Sur ce cylindre est positionné un autre plus petit d’1,3 m de diamètre, recouvert d’un système d’antennes. Le satellite est stabilisé par une rotation de 100 tours/minute autour de son axe principal, quasi aligné parallèlement à l’axe de la Terre. Cela lui permet également le balayage d’un radiomètre d’imagerie unique (effectuant des mesures dans le visible, l’infrarouge et l’infrarouge thermique), fournissant une vue globale de la Terre toutes les 30 minutes.
Du projet français…
Quelques années après la création du CNES (1961), l’idée du satellite météo suscite rapidement l’intérêt, d’autant plus que depuis 1959 les Etats-Unis ont lancé plusieurs satellites dédiés, démontrant l’utilité de tels outils pour observer depuis l’espace et mieux comprendre les phénomènes atmosphériques.
En 1968, à l’initiative de Pierre Morel, du Laboratoire de météorologie dynamique du CNRS, une équipe est mise en place pour étudier la pertinence de réaliser un satellite météo français. La motivation est renforcée par le fait, qu’à l’époque, l’Organisation météorologique mondiale (OMM/WMO) et le Conseil international des Unions scientifiques (CIUS/ICSU) lancent le Global Atmospheric Research Program (GARP), une initiative visant à étudier l’atmosphère terrestre à l’échelle planétaire. Pour Pierre Morel, il ne faisait aucun doute que la France devait s’engager : « Très rapidement, Météosat devait bénéficier d’un soutien effectif du CNES avec les moyens de mener à bien les études de système et le développement industriel du radiomètre-imageur qui devait équiper le satellite. En quelques mois, nous avions en main une conception technique totalement original (…) ».
Toutefois, un certain nombre de difficultés (financières, techniques, etc.) incitent les responsables à européaniser le projet.
…au programme européen.
En septembre 1971, le projet français est présenté aux partenaires de l’ESRO (European Space Research Organisation). Ces derniers acceptent de s’engager dans le programme qui, le 23 mars 1972, devient européen. Ainsi, en plus de la France, sept Etats le financent : Belgique, Danemark, Italie, Allemagne, Royaume Uni, Suède, Suisse. Entre temps, en 1975, l’ESRO, fusionnant avec l’ELDO (European Launcher Development Organisation), se transforme en Agence spatiale européenne (ESA) qui reprend à son compte le programme Meteosat.
Une première série de satellites pré-opérationnels est décidée. La construction du premier Meteosat est alors assurée par le consortium COSMOS regroupant des entreprises européennes (Marconi, MATRA, MBB, Selenia Spazio, etc.), sous la maîtrise d’œuvre du français Aerospatiale. Soulignons que le principal instrument, le radiomètre (un télescope de 3650 mm de focale avec un miroir principal de 40 cm de diamètre), est construit par le français MATRA. Quant à l’assemblage final, il est effectué au centre de Cannes.
Les missions de Meteosat.
Grâce au satellite, les météorologues européens obtiennent des informations sur la couverture nuageuse, les températures de surface de la mer, la vitesse des vents, la répartition de la vapeur d’eau et les bilans radiatifs. Outre les prévisions journalières destinées aux populations, Meteosat livre des données bien utiles pour différentes applications comme les transports aériens et maritimes, l’agriculture, etc.
De plus, dans le cadre du programme First Garp Global Experiment, Meteosat s’insère dans un réseau de cinq satellites aux côtés de trois américains GOES (lancés en octobre 1975, juin 1977 et juin 1978) et du japonais GMS/Himawari 1 (lancé en juillet 1977). Pendant la première phase expérimentale (1978-79), les cinq satellites transmettent des informations en continue qui, pour la première fois, assurent une veille météorologique mondiale.
Après le succès.
Le 19 juin 1981, Meteosat 2, lancé par une Ariane 1, prenait la relève du premier Meteosat tombé prématurément en panne le 24 novembre 1979. Meteosat venait également de mettre en évidence que les satellites pouvaient subir des dommages par le vent solaire, nécessitant des précautions supplémentaires pour les prochains satellites…
S’avérant indispensable à de nombreux points de vue, le programme Meteosat évolu en un système opérationnel pérenne. Pour en assurer l’efficacité, 17 pays européens signent le 24 mai 1983 une convention créant EUMETSAT (European Meteorological Satellites), une organisation chargée d’exploiter les données recueillies par les satellites de météorologie, à l’image de la NOAA américaine. Etablie à Darmstadt, EUMETSAT entre en activité le 19 juin 1986. Dans la foulée, une seconde génération de Meteosat (MSG) est décidée. Quelques années plus tard, EUMETSAT prend la responsabilité du programme Meteosat.
Ainsi après Meteosat 1, six autres satellites de première génération seront lancés avec succès puis, de 2002 à 2015, une seconde génération (MSG) de quatre satellites (avec des capacités améliorées). Une troisième génération (MTG) s’apprête à être déployée assurant la continuité d’un service de qualité jamais démenti.
Philippe Varnoteaux est docteur en histoire, spécialiste des débuts de l’exploration spatiale en France et auteur de plusieurs ouvrages de référence.
Références
Un ouvrage : L’espace en héritage, André Lebeau, O. Jacob, Paris, 1986.
Un article : « L’essor de la météorologie spatiale en Europe : le projet Météosat » de Pierre Morel, La France et l’Europe spatiale (1957-1972), IFHE Publications, 2004.
Un reportage de l’ESA sur Meteosat (17’19).
Depuis 1977, les satellites Meteosat nous envoient au quotidien des données et des images des phénomènes atmosphériques, contribuant aux prédictions météorologiques et à l’amélioration des connaissances du milieu terrestre. Une initiative française.
Le 23 novembre 1977, depuis Cape Canaveral, une fusée américaine Thor Delta lançait avec succès Meteosat 1, le premier satellite européen de météorologie, faisant du même coup entrer l’Europe dans le petit club restreint des puissances maîtrisant l’observation terrestre (Etats-Unis, URSS, Japon). A l’aide d’un moteur d’apogée, Meteosat 1 rejoignait l’orbite équatoriale géostationnaire au-dessus de l’océan Atlantique. Mis à poste le 7 décembre, il envoyait sa première image deux jours plus tard.
Principales caractéristiques.
Haut de 3,2 m, pour un diamètre de 2,1 m et une masse de 697 kg (avec son moteur d’apogée), Meteosat 1 ressemble à un cylindre sur lequel se trouvent les panneaux solaires, mais aussi des structures correspondant notamment aux propulseurs et capteurs. Sur ce cylindre est positionné un autre plus petit d’1,3 m de diamètre, recouvert d’un système d’antennes. Le satellite est stabilisé par une rotation de 100 tours/minute autour de son axe principal, quasi aligné parallèlement à l’axe de la Terre. Cela lui permet également le balayage d’un radiomètre d’imagerie unique (effectuant des mesures dans le visible, l’infrarouge et l’infrarouge thermique), fournissant une vue globale de la Terre toutes les 30 minutes.
Du projet français…
Quelques années après la création du CNES (1961), l’idée du satellite météo suscite rapidement l’intérêt, d’autant plus que depuis 1959 les Etats-Unis ont lancé plusieurs satellites dédiés, démontrant l’utilité de tels outils pour observer depuis l’espace et mieux comprendre les phénomènes atmosphériques.
En 1968, à l’initiative de Pierre Morel, du Laboratoire de météorologie dynamique du CNRS, une équipe est mise en place pour étudier la pertinence de réaliser un satellite météo français. La motivation est renforcée par le fait, qu’à l’époque, l’Organisation météorologique mondiale (OMM/WMO) et le Conseil international des Unions scientifiques (CIUS/ICSU) lancent le Global Atmospheric Research Program (GARP), une initiative visant à étudier l’atmosphère terrestre à l’échelle planétaire. Pour Pierre Morel, il ne faisait aucun doute que la France devait s’engager : « Très rapidement, Météosat devait bénéficier d’un soutien effectif du CNES avec les moyens de mener à bien les études de système et le développement industriel du radiomètre-imageur qui devait équiper le satellite. En quelques mois, nous avions en main une conception technique totalement original (…) ».
Toutefois, un certain nombre de difficultés (financières, techniques, etc.) incitent les responsables à européaniser le projet.
…au programme européen.
En septembre 1971, le projet français est présenté aux partenaires de l’ESRO (European Space Research Organisation). Ces derniers acceptent de s’engager dans le programme qui, le 23 mars 1972, devient européen. Ainsi, en plus de la France, sept Etats le financent : Belgique, Danemark, Italie, Allemagne, Royaume Uni, Suède, Suisse. Entre temps, en 1975, l’ESRO, fusionnant avec l’ELDO (European Launcher Development Organisation), se transforme en Agence spatiale européenne (ESA) qui reprend à son compte le programme Meteosat.
Une première série de satellites pré-opérationnels est décidée. La construction du premier Meteosat est alors assurée par le consortium COSMOS regroupant des entreprises européennes (Marconi, MATRA, MBB, Selenia Spazio, etc.), sous la maîtrise d’œuvre du français Aerospatiale. Soulignons que le principal instrument, le radiomètre (un télescope de 3650 mm de focale avec un miroir principal de 40 cm de diamètre), est construit par le français MATRA. Quant à l’assemblage final, il est effectué au centre de Cannes.
Les missions de Meteosat.
Grâce au satellite, les météorologues européens obtiennent des informations sur la couverture nuageuse, les températures de surface de la mer, la vitesse des vents, la répartition de la vapeur d’eau et les bilans radiatifs. Outre les prévisions journalières destinées aux populations, Meteosat livre des données bien utiles pour différentes applications comme les transports aériens et maritimes, l’agriculture, etc.
De plus, dans le cadre du programme First Garp Global Experiment, Meteosat s’insère dans un réseau de cinq satellites aux côtés de trois américains GOES (lancés en octobre 1975, juin 1977 et juin 1978) et du japonais GMS/Himawari 1 (lancé en juillet 1977). Pendant la première phase expérimentale (1978-79), les cinq satellites transmettent des informations en continue qui, pour la première fois, assurent une veille météorologique mondiale.
Après le succès.
Le 19 juin 1981, Meteosat 2, lancé par une Ariane 1, prenait la relève du premier Meteosat tombé prématurément en panne le 24 novembre 1979. Meteosat venait également de mettre en évidence que les satellites pouvaient subir des dommages par le vent solaire, nécessitant des précautions supplémentaires pour les prochains satellites…
S’avérant indispensable à de nombreux points de vue, le programme Meteosat évolu en un système opérationnel pérenne. Pour en assurer l’efficacité, 17 pays européens signent le 24 mai 1983 une convention créant EUMETSAT (European Meteorological Satellites), une organisation chargée d’exploiter les données recueillies par les satellites de météorologie, à l’image de la NOAA américaine. Etablie à Darmstadt, EUMETSAT entre en activité le 19 juin 1986. Dans la foulée, une seconde génération de Meteosat (MSG) est décidée. Quelques années plus tard, EUMETSAT prend la responsabilité du programme Meteosat.
Ainsi après Meteosat 1, six autres satellites de première génération seront lancés avec succès puis, de 2002 à 2015, une seconde génération (MSG) de quatre satellites (avec des capacités améliorées). Une troisième génération (MTG) s’apprête à être déployée assurant la continuité d’un service de qualité jamais démenti.
Philippe Varnoteaux est docteur en histoire, spécialiste des débuts de l’exploration spatiale en France et auteur de plusieurs ouvrages de référence.
Références
Un ouvrage : L’espace en héritage, André Lebeau, O. Jacob, Paris, 1986.
Un article : « L’essor de la météorologie spatiale en Europe : le projet Météosat » de Pierre Morel, La France et l’Europe spatiale (1957-1972), IFHE Publications, 2004.
Un reportage de l’ESA sur Meteosat (17’19).
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